Matter : la norme qui veut révolutionner la domotique
Matter : la norme qui veut révolutionner la domotique
Avec plusieurs reports, la norme Matter voit enfin le jour. Adoptée par les géants du numérique, elle promet une révolution dans la domotique en établissant un standard pour tous les appareils connectés de la maison.
Les objets connectés se démocratisent de plus en plus. Caméras, enceintes, ampoules, aspirateurs-robots, thermostats, prises électriques, appareils électroménagers et autres sonnettes ont envahi les foyers ces dernières années avec la promesse de simplifier notre quotidien. Problème : ils ne parlent pas tous le même langage et ils se pilotent le plus souvent à travers des applications différentes. Certains sont seulement contrôlables par Bluetooth, d'autres ne comprennent que le Wi-Fi, et certains ont absolument besoin d'un hub branché à la box Internet. Sans compter que les trois écosystèmes censés tout centraliser – Apple HomeKit, Amazon Alexa et Google Home – sont incompatibles entre eux. Du coup, difficile de synchroniser toutes les données et options de scénarios, et le choix d'un nouvel appareil est toujours un casse-tête puisqu'il faut s'assurer qu'il est compatible avec les autres éléments de l'écosystème du domicile. Bref, on est encore bien loin de l'idéal de la domotique avec une maison entièrement et facilement…
C'est précisément la raison pour laquelle les géants de la tech comme Apple, Amazon et Google, mais aussi de nombreux fabricants – comme Signify avec sa gamme Philips Hue et Samsung avec SmartThings – se sont rassemblés au sein de la Connectivity Standards Alliance (CSA) et ont collaboré pour créer Matter. Le but ? Simplifier la gestion et l'interactivité des objets connectés au quotidien en servant de pont entre tous les équipements prenant en charge cette norme. Il s'agit de mettre en place une interopérabilité entre les différents assistants domotiques et connectés – Alexa, Siri, Google Assistant… – et les plateformes domotiques. Aussi, tous les appareils certifiés Matter pourront communiquer avec n'importe quelle plateforme, ce qui devrait faciliter à la fois leur achat, leur installation et leur utilisation au sein d'un écosystème connecté. La norme devait être lancée en 2020, mais, ayant été repoussée à plusieurs reprises, elle n'est proposée dans sa version finale que ce 4 octobre sur GitHub. Elle concernera les futurs équipements conçus avec ce protocole, mais aussi ceux qui auront été mis à jour.
Quelle est l'utilité du protocole Matter ?
Le projet Matter a été annoncé fin 2019 par Amazon, Apple, Google et la Zigbee Alliance – depuis rebaptisée CSA – comme une "norme de connectivité libre de droits pour accroître la compatibilité entre les produits de la maison connectée". Initialement, il devait s'appeler Connected Home over IP (CHIP). Il s'agit d'une sorte de langage commun aux objets connectés qui leur permet de tous se connecter à la maison sans que la marque de son smartphone ou l'assistant vocal utilisé ne soit une restriction. En gros, il combine différents standards de communication – câble Ethernet, wi-fi, Thread et Bluetooth – afin de simplifier l'appairage et l'utilisation des différents appareils. Il s'appuie pour cela sur le protocole domotique ZigBee, qui offre une grande portée de connexion ainsi qu'une faible consommation en énergie. De plus, il est autonome, car il offre la possibilité de créer un maillage entre les appareils, sans dépendre de la qualité de la connexion Internet.
Le protocole Matter offre de nombreux avantages. En effet, il permet d'abattre les barrières qui existent actuellement entre les différentes marques. Ainsi, le client n'aura plus à s'interroger sur la compatibilité d'un nouvel appareil avec le système installé chez lui, ce qui va faciliter son achat et lui offrir un choix plus large, puisqu'un produit Matter sera automatiquement reconnu et intégré au réseau déjà en place. C'est ce qu'on appelle l'interopérabilité. L'installation d'un objet connecté est donc plus facile. Attention toutefois, car, si en temps normal les appareils équipés du standard Thread n'ont pas besoin d'un routeur compatible ou d'un pont de connexion dédié pour communiquer entre eux – par exemple, un détecteur de fenêtre qui n'est pas à portée directe du système d'alarme peut communiquer avec le système de sécurité via une ampoule connectée –, ils doivent absolument passer par un routeur pour communiquer avec des appareils qui ne fonctionnement pas via Thread – même s'ils sont certifiés Matter.
Comme tous les produits labellisés Matter peuvent communiquer entre eux, l'utilisateur peut mettre en place des scénarios complexes. Exemple : automatiser l'allumage des lumières à l'ouverture d'une porte, ou éteindre le chauffage et fermer les volets s'il n'y a plus personne dans le logement. En plus, l'écosystème est plus sécurisé, puisque chaque appareil certifié Matter doit répondre à des normes de sécurité et de confidentialité – il doit être crypté et protégé contre les écoutes. La technologie de blockchain va certifier la provenance de l'objet lors de son installation, et garantir que les modifications et mises à jour apportées aux logiciels sont enregistrées de manière décentralisée et transparente, et qu'elles pourront être vérifiées par tout le monde. L'acheteur peut donc se diriger sans crainte vers des marques moins grandes et connues lors de ses achats.
Quels appareils sont concernés par Matter ?
Les équipements certifiés Matter seront dotés d'un logo facilement identifiable et d'un code de configuration pour se connecter au réseau d'objets connectés. Tous les appareils concernant la télévision, les lecteurs multimédias, le contrôle de la température, l'éclairage connecté – ampoules, interrupteurs, stores et volets – et la sécurité – détecteurs, capteurs – vont être concernés. En revanche, la CSA a décidé de ne pas rendre les caméras de sécurité compatibles avec cette version de Matter – peut-être plus tard ? Idem pour les purificateurs d'air, les robots aspirateurs ou encore les réfrigérateurs. Ainsi, un interphone connecté Amazon Ring restera pour le moment exclusif à Amazon Alexa.
De nombreux fabricants comme Amazon, Google, eWeLink, Ledvance, Sengled, TP-Link, Tuya et Lifx ont annoncé qu'un grand nombre de leurs appareils recevront des mises à jour pour être compatibles avec le protocole Matter. Google en prévoit dès cet automne pour tous ses objets connectés existants. Ainsi, les enceintes Google Home, Google Nest et les routeurs Nest Wifi pourront servir de pont Matter – ils se chargeront de gérer la communication entre les différents appareils de la maison grâce au protocole Thread, tandis que les objets, comme le Nest Thermostat, les détecteurs de mouvement Google ou le détecteur de fumée Nest, fonctionneront avec Apple HomeKit et Amazon Alexa après leur mise à jour. Les objets connectés à venir de Google seront directement compatibles avec Matter, sans que l'utilisateur ait besoin de les ajouter manuellement dans une application de type Google Home ou Apple Home. La majorité des équipements Amazon devraient également être compatibles rapidement. Du côté d'Apple, c'est la version 16.1 d'iOS – actuellement en bêta – qui sera le support du protocole.
D'autres constructeurs ont déjà annoncé que leurs appareils seraient par la suite compatibles avec Matter – sans donner de date précise. Signify – anciennement Philips – a déclaré que ses ampoules Hue et WiZ seront certifiées Matter grâce à une mise à jour de son pont Philips Hue Bridge, tandis que ses futurs objets pourront fonctionner sans. De même, Samsung a annoncé que certains de ses téléviseurs et moniteurs connectés fonctionneront comme des hubs Matter pour contrôler les appareils compatibles.