Très haut débit : l'État double l'aide pour l'accès sans fil

Très haut débit : l'État double l'aide pour l'accès sans fil

À partir du 1er avril 2022, le montant de l'aide de l'État aux particuliers ne disposant pas d'une bonne connexion internet va passer de 150 euros à 300 voire à 600 euros. Mais la procédure pour en bénéficier n'est pas simple.

Le Gouvernement a décidé d'aider les "oubliés du très haut débit" . Début février, lors d'un déplacement sur un chantier de raccordement à la fibre, début février, le Premier ministre, Jean Castex, a en effet annoncé le doublement de l'aide financière allouée par les pouvoirs publics sur le coût d'équipement, d'installation ou de mise en service de solutions d'accès à Internet sans fil. Depuis 2019, et grâce au dispositif Cohésion numérique des territoires, les particuliers et les entreprises éligibles peuvent bénéficier d'un coup de pouce financier pouvant aller jusqu'à 150 euros. À partir du 1er avril 2022, cette aide de l'État sera portée à 300 euros, voire à 600 euros sous conditions de ressources, c'est-à-dire "lorsque les personnes concernées auront des ressources qui ne leur permettront pas de faire face (à ce type d'investissement)", a déclaré le Premier ministre.

En dépit du contexte, cette déclaration ne relève pas de la simple promesse électorale. Elle s'inscrit en fait dans le cadre de la mise en œuvre du plan France Très Haut Débit, lancé en 2013 sous la présidence de François Hollande, et repris par le gouvernement d'Emmanuel Macron. Cette initiative, qui représente un investissement total de 20 milliards d'euros publics et privés, avait pour objectif de déployer le très haut débit sur l'ensemble du territoire français d'ici à la fin de l'année 2022. Par "très haut débit", on entend un débit supérieur à 30 Mbits/s, quelle que soit la technologie employée. Le président de la République a ajouté une nuance, en parlant de "bon haut débit", qui correspond à un minimum de 8 Mbit/s. Or si l'échéance approche à grands pas, le pari est encore loin d'être gagné.

Très haut débit : la fibre pour tous en 2025 ?

Car si l'on connaissait la fracture sociale, il faut aujourd'hui compter aussi avec la fracture numérique. Elle existe dans les usages – les jeunes sont naturellement beaucoup à l'aise que les anciens dans l'utilisation des outils numériques –, mais aussi dans les accès. Et plus particulièrement l'accès à Internet à haut débit, qui ouvre la voie à d'innombrables applications, comme la vidéo en streaming ou la visioconférence. Hélas, si la fibre optique progresse sans cesse – selon l'Arcep, on comptait 17,5 millions d'abonnés à la fibre en FTTH fin septembre 2021 – tout comme le déploiement de la 5G – avec plus de 16 000 sites compatibles, toujours selon l'Arcep –, il existe encore de nombreux endroits en France qui doivent se contenter d'une connexion à bas débit. Des zones, le plus souvent rurales, privées d'un Internet rapide, en filaire comme sur les réseaux de téléphonie mobile, où même l'ADSL – amené à disparaître dans quelques années avec le démantèlement des lignes de cuivre – et la 4G restent anémiques. 

Certes, dans le cadre du Plan de relance, le Gouvernement a mobilisé 570 millions d'euros pour accélérer le déploiement de la fibre, en promettant une couverture totale du territoire d'ici à 2025. En attendant, et comme l'ADSL a atteint ses limites, la seule solution pour profiter d'un "bon haut débit" ou d'un très haut débit consiste à se tourner vers les technologies sans fil. Il en existe actuellement trois : la boucle locale radio (qui exploite la THD Radio), le satellite et la téléphonie mobile. Les deux premières, qui sont proposés par des opérateurs spécialisés et souvent peu connus  comme Ozone, NordNet, WeAccess, Numerisat ou Europasat, nécessitent l'installation d'un matériel spécifique assez coûteux (antenne, récepteur…). La troisième repose sur les réseaux 4G et 5G de téléphonie mobile et ne réclame qu'un modem spécifique assorti d'un abonnement particulier chez des opérateurs populaires comme Orange, Bouygues Telecom ou SFR.

Internet en 4G et 5G : des débits loin des promesses

Malheureusement, si elle paraît plus simple et plus accessible sur le papier, la solution 4G/5G n'est pas égalitaire en pratique. La faute aux zones blanches, ces territoires mal desservis par les réseaux de téléphonie mobile en haut débit qui représentent encore 15 % du pays. Et à un manque de volontarisme de la part de certains acteurs du marché des télécommunications. C'est le constat alarmant que dressait en récemment l'UFC-Que Choisir à propos de la qualité de réception de l'Internet mobile. Pour contrer les campagnes marketing des opérateurs vantant des débits mirifiques de la 5G, l'association a développé l'application mobile gratuite et participative Queldébit". Or, "les chiffres recueillis sur le terrain mettent en évidence une inégalité extrêmement marquée, puisque dans les zones urbaines les débits moyens sont 66 % plus élevés qu'en zones rurales (55,3 Mbit/s contre 33,3 Mbit/s)", relève l'UFC-Que Choisir. Une analyse poussée de plus de 5 millions de données a permis de mettre en évidence l'existence de disparités importantes, et de démontrer que pour beaucoup de consommateurs accéder dans de bonnes conditions à l'internet mobile est tout simplement chimérique. Ainsi, 14,3 % des débits relevés sont inférieurs à 3 Mbit/s, débit minimal pour accéder dans des conditions tout juste décentes aux services de base de l'Internet mobile, comme la navigation sur le Web. Quant au fameux "bon haut débit" défini par Emmanuel Macron, il n'est pas atteint dans 25 % des cas au niveau national via la téléphonie mobile, et même dans 32 % des cas en zones rurales.

Aide d'État pour un haut débit sans fil : un parcours du combattant

En clair, même avec l'augmentation de l'aide d'État, il n'est pas garanti que tous les citoyens puissent disposer d'une connexion à Internet correcte en attendant le déploiement généralisé de la fibre optique. En outre, la procédure pour bénéficier de ce coup de pouce n'est pas intuitive. Et elle risque de poser problème à des populations peu à l'aise avec les nouvelles technologies, d'autant qu'elle passe essentiellement par… Internet ! En effet, pour en profiter, il faut d'abord aller sur la page dédiée du site de l'Agence nationale de la cohésion des territoires. Il faut ensuite indiquer une commune pour voir s'afficher une liste d'opérateurs proposant des solutions d'accès sans fil, certains – pas tous… – proposant des offres labellisées "Cohésion Numérique" permettant d'avoir accès au "bon haut débit". Ensuite, il faut les contacter individuellement par téléphone ou par Internet pour étudier ces formules et entamer les démarches. Un petit parcours du combattant que beaucoup ne tenteront sans doute même pas d'aborder…

Guide box et connexion Internet