Abonnement Prime : Amazon accusé de piéger les consommateurs

Abonnement Prime : Amazon accusé de piéger les consommateurs

Incitant ses clients à souscrire à son programme Prime pour profiter de nombreux avantages, Amazon est accusé de manipuler les consommateurs avec des techniques trompeuses, notamment pour la résiliation d'abonnement.

Amazon Prime, le service payant du géant du e-commerce, a su séduire de nombreux clients. Facturés 69,90 euros par an ou 6,99 euros par mois en France, les abonnées bénéficient de livraisons gratuites et prioritaires, d'un accès au service de streaming Prime Video, à deux millions de titres de musique à écouter hors connexion et à une sélection de livres numériques. Mais s'il est particulièrement simple de s'y abonner, ceux qui ne veulent plus le payer doivent faire face, dans certains pays, à un véritable parcours du combattant pour pouvoir le résilier. C'est pour ces raisons que la Federal Trade Commission (FTC), l'autorité chargée de la protection des consommateurs aux États-Unis, attaque Amazon en justice – contrairement à la Commission européenne, qui peut décider d'amendes et de sanctions, la FTC doit passer par un juge pour obtenir une condamnation –, à la suite d'une enquête qui a commencé en mars 2021, pour avoir trompé des millions d'Américains. Elle réclame des dommages et intérêts, sans donner de montant précis.

Dans un communiqué publié le mercredi 21 juin 2023, la FTC explique que le géant du e-commerce a recours à des pratiques "manipulatrices, coercitives ou trompeuses" pour inciter des millions d'utilisateurs à souscrire et à renouveler automatiquement leurs abonnements Prime – qui coûte 14,99 dollars par mois ou 139 dollars par an aux États-Unis – "sans leur consentement" et lui reproche d'avoir "saboté leurs tentatives d'annulation". Pour cela, l'entreprise aurait eu recours à un procédé classique appelé dark pattern, qui consiste à influencer le comportement du client à l'avantage des sites et des commerçants, ici grâce à l'interface de la plateforme (voir notre article).

Poursuites Amazon Prime : des dark patterns pour duper les utilisateurs

Le premier point problématique est que, quand un consommateur valide son panier Amazon, il peut difficilement éviter de souscrire à un abonnement. Le processus d'achat le manipule afin de l'inciter à s'abonner, parfois sans qu'il ne s'en rende compte. En effet, une offre pour tester Amazon est proposée à chaque commande et, soit l'option pour acheter ses articles sans s'abonner à Prime est plus difficile à trouver pour les consommateurs que son homologue, soit le bouton n'indique pas clairement qu'ils acceptent de s'inscrire à Prime. Et comme ils bénéficient de trente jours d'essai gratuits, il est très facile de s'abonner par mégarde… et d'oublier ensuite de suspendre l'abonnement, pour se retrouver débité le mois suivant.

L'ancienne et complexe interface pour se désabonner d'Amazon Prime en France. © CCM

Mais s'il est très facile pour les utilisateurs de s'inscrire à Amazon Prime, l'inverse est une tout autre histoire ! Les clients américains qui se rendent compte de la supercherie ou ne souhaitent plus payer l'abonnement doivent passer par une procédure d'annulation dont l'objectif premier "n'était pas de permettre aux abonnés de résilier leur abonnement, mais de les en empêcher", estime la FTC. En effet, ils doivent tout d'abord localiser l'endroit où effectuer la démarche, ce qui n'est pas une mince affaire. Ensuite, ils sont redirigés vers de multiples pages présentant plusieurs alternatives : poursuivre l'abonnement à un prix réduit, désactiver la fonction de renouvellement automatique ou décider de ne pas résilier l'abonnement. Ce n'est qu'après qu'ils peuvent enfin annuler le service. Mais l'autorité reproche également aux dirigeants de l'entreprise d'avoir ralenti ou rejeté les modifications des interfaces de la plateforme, et même d'avoir "tenté de retarder et d'entraver l'enquête de la Commission à plusieurs reprises".

Amazon avait déjà été rappelé à l'ordre par l'Union européenne pour les mêmes raisons, et avait été obligé de faciliter le processus de résiliation de Prime (voir notre article). Mais le géant du e-commerce est loin d'être le seul à user de telles pratiques. C'est pourquoi le Gouvernement a voté la loi "résiliation en trois clics", qui entre progressivement en vigueur auprès des services de différents secteurs (contrats d'assurance, forfaits mobiles et Internet, contrats d'énergie, abonnements de streaming et de presse...). Dans tous les cas, les consommateurs européens devraient bientôt être à l'abri de telles pratiques, puisque les dark patterns sont interdites depuis l'entrée en vigueur du Digital Market Act (DMA) et, bientôt, du Digital Services Act (DSA)