Complotisme, fake news et antivax : YouTube va restaurer les comptes bannis pour désinformation

Complotisme, fake news et antivax : YouTube va restaurer les comptes bannis pour désinformation

Alors que les fake news, thèses complotistes et discours haineux se multiplient sur Internet, YouTube va restaurer les comptes américains qui avaient été bannis pour cause de désinformation. Voilà qui devrait faire plaisir à Donald Trump !

Internet représente une immense source de savoirs accessibles à tous en quelques clics. Toutefois, face à la quantité de sources disponibles, on peut vite se retrouver perdu et avoir du mal à déterminer les données fiables et pertinentes. D'autant plus que certains acteurs jouent là-dessus afin de propager des fake news et des propos haineux et discriminants, se servant des différentes plateformes comme caisse de résonance pour leurs opinions politiques.

Si, jusqu'ici, les plateformes faisaient des efforts pour contenir la désinformation qui s'y propageait, les choses ont radicalement changé. Depuis le début du second mandat de Donald Trump, les géants de la tech multiplient les appels du pied au président américain, grand critique des vérificateurs de l'information et propagateur de fake news.

Et, visiblement, le dîner d’État qui a rassemblé Mark Zuckerberg, Jeff Bezos, Bill Gates, Sam Altman, Tim Cook ou encore Sundar Pichai début septembre s'est bien passé ! Google a décidé de faire une nouvelle marque d'allégeance en envoyant à la Chambre des représentants une lettre, et pas des moindres ! L'entreprise y annonce mettre fin à une grande partie de sa politique contre la désinformation sur YouTube, notamment en rétablissant les nombreuses chaînes qu'elle avait bannies en raison de propos complotistes sur la Covid-19 et sur les élections américaines. Un tournant pour la plateforme, qui réaffirme "l'engagement de la société en faveur de la liberté d'expression".

Désinformation sur YouTube : Google, loyal vassal  de Donald Trump

Au cours de ces dernières années, YouTube a supprimé de nombreuses chaînes qui propageaient des fake news relatives à l'élection américaine de 2020, à la crise du Covid – et plus particulièrement mettant en doute les avancées scientifiques et les effets du vaccin  – ainsi qu'à la journée du 6 janvier 2021, date à laquelle des partisans de Donald Trump ont assiégé le Capitole. Mais ça, c'était avant.

L'entreprise de Sundar Pichai fait complètement machine arrière et annonce que "YouTube offrira à tous les créateurs la possibilité de revenir sur la plateforme si l'entreprise a supprimé leurs chaînes pour violations répétées des politiques relatives au Covid-19 et à l'intégrité des élections politiques qui ne sont plus en vigueur". Elle va même plus loin en rejetant la faute sur l'administration de Joe Biden, qui aurait fait pression sur la plateforme afin qu'elle supprime les voix n'allant pas dans son sens. Elle les accuse d'avoir "mené des actions de sensibilisation répétées et soutenues auprès d'Alphabet et fait pression sur la société concernant certains contenus générés par les utilisateurs liés à la pandémie de COVID-19 qui ne violaient pas ses politiques". "Il est inacceptable et injustifié qu'un gouvernement, y compris l'administration Biden, tente de dicter à Alphabet la manière dont elle doit modérer les contenus", s'insurge-t-elle. Quelle douce ironie ! 

Le géant du numérique en profite ensuite pour caresser lourdement Donald Trump dans le sens du poil : "YouTube accorde de l'importance aux opinions conservatrices sur sa plateforme et reconnaît que ces créateurs ont une grande portée et jouent un rôle important dans le débat civique. Alphabet reconnaît que ces créateurs font partie de ceux qui façonnent la consommation en ligne d'aujourd'hui, en proposant des interviews 'incontournables' qui permettent aux spectateurs d'entendre directement les politiciens, les célébrités, les chefs d'entreprise et bien d'autres encore."

Désinformation sur YouTube : l'Union européenne comme prochaine cible

Pour l'instant, cette décision ne concerne que le territoire américain. Dans l'Union européenne, la plateforme est toujours tenue de respecter un certain nombre de réglementations, notamment en matière de modération des contenus. À ce sujet, le géant du numérique en a profité pour s'en prendre au Vieux Continent, l'accusant de faire porter aux entreprises américaines "une charge réglementaire disproportionnée". Il va plus loin encore en affirmant que le Digital Services Act (DSA) ferait peser une menace sur la liberté d'expression "au sein et à l'extérieur" de l'UE  – un discours là encore identique à celui de l'administration Trump. On en connaît un qui n'a toujours pas digéré son amende de 2,95 milliards d'euros !

Ce n'est pas la première fois que Google fait du charme à Donald Trump pour rentrer dans ses bonnes grâces. L'entreprise a ainsi mis fin à ses programmes pour la diversité, transformé le "Golfe du Mexique" en "Golfe d'Amérique" sur ses cartes, et supprimé des commémorations importantes de son calendrier, comme le mois des fiertés LGBTQ+ en juin et le Mois de l'histoire des Noirs en février (voir notre article). Elle avait également ouvert une première porte à la désinformation sur YouTube en juin dernier, lorsque l'entreprise avait discrètement modifié sa politique de modération, en tolérant davantage de contenus à condition qu'ils soient "d'intérêt public" – un terme relativement et volontairement vague.