Frais de livraison pour les livres : la fin de la gratuité (ou presque)
Les frais de port à 1 centime, c'est fini ! À partir du 4 octobre, un prix plancher de livraison de 3 euros sera appliqué aux commandes de livres passée en ligne, afin de soutenir les librairies face aux géants du e-commerce comme Amazon.
Bonne nouvelle pour les libraires, mauvaise nouvelle pour les consommateurs, très mauvaise nouvelle pour Amazon, Fnac, Cultura et compagnie ! La livraison quasi-gratuite de livres, c'est bientôt fini ! À compter du 4 octobre prochain, les règles changent. Le tarif de livraison sera d'au minimum 3 euros pour les commandes allant jusqu'à 35 euros. Au-delà – et à condition que la commande contiennent exclusivement des livres – les frais peuvent être baissés à un centime. Une mesure adoptée afin de protéger – en théorie – les petites librairies indépendantes face aux grandes plateformes de e-commerce. Dans le détail, voici les nouveaux frais de port qui s'appliqueront :
- Commande de moins de 35 € (livres uniquement) : frais de port minimum de 3 € ;
- Commande de plus de 35 € (livres uniquement) : frais de port abaissés à 0,1 centime ;
- Commande de plus de 35 € (livres et autres produits) : frais de port minimum de 3 € si le montant des livres ne dépasse pas 35 € ;
- Commande de plus de 35 € (livres et autres produits) : frais de port abaissés à 0,1 centime si le montant des livres dépasse 35 €.
Livraison de livres : la fin des frais de port à un centime
Ce changement fait suite à un arrêté ministériel publié le 7 avril 2023 au Journal officiel, qui fixe à 3 euros minimum le seuil règlementaire des frais de port pour toute commande de livres passée en ligne pour un montant inférieur à 35 euros. Ce texte, signé par la ministre de la Culture Rima Abdul Malak et par son collègue de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, s'inscrit de la droit fil de la loi Darcos du 30 décembre 2021, qui entendait soutenir l'économie du livre et inciter les lecteurs à se rendre davantage en librairie.
Après l'adoption du prix unique du livre en 1981 avec la loi Lang, la France est donc une fois de plus à l'avant-garde quand il s'agit de défendre les intérêts de l'économie du livre et de ses éditeurs. Les internautes qui ont pour habitude d'acheter des livres en ligne, et tout particulièrement chez la bête noire des libraires, Amazon, devront donc bientôt payer plus cher, même en cas de commande mixte – avec un livre et un autre type de produit – ou en passant par un programme de fidélité – du type Amazon Prime, pour ne pas le nommer. À noter qu'au-delà de 35 euros, le seuil plancher de facturation minimum des frais de port retombera à un centime symbolique (voir notre article).
Frais de port à 3 euros minimum : une mesure anti-Amazon ?
À y regarder de plus près, cette mesure pourrait s'avérer être à double tranchant. D'un côté, elle pourrait effectivement inciter les lecteurs à visiter plus fréquemment leurs librairies de quartier. Mais, de l'autre, dans un contexte inflationniste, elle pourrait également pousser les internautes à passer des commandes de livres groupés et d'un montant supérieur à 35 euros pour pouvoir profiter de frais de port réduits à un centime d'euro. De plus, on peut se demander quel impact aura cette nouvelle mesure sur l'activité des librairies indépendantes en ligne, petites ou grandes et concurrentes du géant Amazon, car à coût égal, les délais de livraison proposés aujourd'hui par le groupe américain restent les plus resserrés du marché. Finalement, cette décision en convient à aucun des partis.
On s'en doute, Amazon et compagnie se sont vivement opposés à cette loi, qui leur fait perdre un de leurs principaux avantages face aux commerces de proximité. Ces entreprises ont notamment avancé l'argument du pouvoir d'achat dans le contexte d'inflation actuel – puisque les consommateurs devront payer plus cher pour recevoir leurs ouvrages. En plus, cela pénaliserait également les habitants des zones rurales, qui ne peuvent pas forcément se rendre facilement dans une librairie, et comptent donc sur la livraison. Elles désiraient négocier pour un prix minimum de 2 euros, sans succès.
Livraison à 3 euros : un prix plancher qui suscite des mécontentements
Pour sa part, le syndicat de la librairie française (SLF) plaide pour la mise en place d'un tarif postal plus avantageux, considérant que "cette mesure constitue un premier pas important pour rééquilibrer la concurrence entre détaillants sur le marché de la vente en ligne de livres". En particulier, l'application du seuil de frais de port aux commandes mixtes et aux programmes de fidélité lui paraît de nature à éviter les "contournements". Il craint cependant que la réintroduction de la quasi-gratuité au-delà de 35 euros d'achat n'amoindrisse la portée de la mesure et n'entretienne "une culture de la gratuité contraire à la logique du prix unique du livre". C'est pourquoi le SLF désiraient initialement une somme minimale de 4,5 euros, quelle que soit la somme totale de la commande, en mettant en avant que le coût moyen d'une expédition revient à plus de 7 euros aux libraires.
Quant aux libraires, ils se portent plutôt bien, merci ! Sur la seule année 2022, pas moins de 142 nouvelles librairies ont ouvert leurs portes sur tout le territoire, profitant du goût croissant des Français pour la lecture, notamment depuis le confinement. Personne ne se plaindra de ce appétit pour un loisir non connecté… à moins que les lecteurs ne se tournent davantage vers le livre numérique.