AirTag espion : Apple poursuivi en justice à cause des harceleurs

AirTag espion : Apple poursuivi en justice à cause des harceleurs

Apple est poursuivi devant la justice californienne par trois personnes à cause de son tracker AirTag. En cause : le petit accessoire est souvent détourné par les harceleurs et autres personnes malveillantes à des fins d'espionnage.

L'AirTag d'Apple a su conquérir le cœur des consommateurs et est devenu très populaire. Ce petit boîtier se glisse n'importe où – sur un jeu de clés, au fond d'un sac, sur une valise, dans une poche, dans un portefeuille, sous une selle de deux-roues, dans une voiture, etc. – et permet en quelques instants à son propriétaire de le localiser précisément. Pratique pour retrouver ses affaires en cas de perte ou de vol ! Mais, comme souvent avec la technologie, le gadget a vite été détourné de son usage initial. Et des personnes malveillantes ont commencé à l'utiliser à des fins d'espionnage. Il suffit en effet d'en glisser discrètement un dans un bagage ou sous un véhicule pour suivre quelqu'un à la trace, à son insu. Et savoir en permanence où il se trouve, en le localisant sur un smartphone en temps réel. Une technique redoutable pour pister un conjoint que l'on soupçonne d'infidélité, un ado adepte de l'école buissonnière ou encore un concurrent. Sans compter les voleurs qui repèrent de riches victimes potentielles dans une gare, un aéroport ou un parking avant d'aller les cambrioler à leur domicile, les amoureux éconduits qui ne "supportent" pas une séparation ou encore les prédateurs sexuels qui trouvent là un moyen facile de pister leur proie. De nombreuses affaires de ce type ont été relayées par les médias partout dans le monde, depuis que les AirTag sont apparus sur le marché.

En octobre dernier, des victimes de harcèlement à cause de l'AirTag ont porté plainte contre Apple, sous forme d'action collective. Des dizaines de personnes accusaient la firme de Cupertino de leur avoir causé du tort, par l'usage détourné de son traceur, et d'avoir fait preuve de négligence dans la gestion des risques de harcèlement potentiellement engendrés par ses AirTag, en vertu de la loi californienne. Bien évidemment, l'entreprise a nié toute responsabilité, demandant au juge de rejeter les plaintes. Finalement, le tribunal de San Francisco a autorisé trois plaignants à aller plus loin dans leurs poursuites, comme le rapporte Bloomberg.

Espionnage par AirTag : des mesures de protection jugées insuffisantes

LaPrecia Sanders, une habitante de l'Indiana qui fait partie des plaignants, accuse l'AirTag d'Apple d'avoir joué un rôle décisif dans la mort de son fils. N'ayant pas supporté la rupture, l'ex-petite amie de ce dernier l'a suivi pendant des heures, avant de l'écraser en voiture, alors qu'il sortait d'un bar. Un exemple tragique parmi tant d'autres... "Avec un prix de seulement 29 dollars, il est devenu l'arme de prédilection des harceleurs et des agresseurs", peut-on lire dans la plainte. Aussi, vendredi dernier, le juge de district californien Vince Chhabria n'a pas fait droit à la demande d'Apple de rejeter l'action, estimant que les trois plaignants ont présenté suffisamment d'allégations pour négligence et responsabilité du fait des produits pour aller jusqu'au procès.

De son côté, Apple a fait valoir ses mesures de sécurité pour ses AirTag qu'il a introduites par la suite et le fait qu'il ne pouvait pas être tenu pour responsable en cas d'utilisation abusive du produit. En effet, en novembre 2022, Apple avait déployé la version 2.0.24 du firmware – le logiciel interne – de ses balises de suivi. Ainsi, la fonction "Localisation précise" aide à localiser un AirTag inconnu détecté qui se déplace avec la personne. Si son iPhone est allumé, une notification l'avertit lorsqu'un AirTag séparé de son propriétaire voyage avec elle et émet un son pour indiquer qu'il a été déplacé (voir notre article). Google lui a emboîté le pas à la fin de l'année 2023, en développant une fonction similaire (voir notre article). Mais ces mesures ne résolvent pas complètement le problème... Les trois plaignants allèguent que, lorsqu'ils ont été harcelés, "les problèmes avec les dispositifs de sécurité de l'AirTag étaient importants et que ces défauts de sécurité ont causé leurs blessures".

"Apple pourrait avoir raison de dire que la loi californienne ne l'obligeait pas à faire plus pour réduire la capacité des harceleurs à utiliser efficacement les AirTag, mais cette décision ne peut pas être prise à ce stade précoce", note toutefois le juge. Il n'est donc pas dit que les victimes gagnent leur procès contre Apple. D'autant plus que la marque à la pomme et Google ont annoncé l'année dernière leur collaboration pour développer des normes industrielles visant à lutter de façon proactive contre le mésusage de ces dispositifs de suivi. Cette nouvelle spécification commune permettra aux smartphones iOS et Android de détecter automatiquement les fameux traqueurs Bluetooth inconnus. La plupart des fabricants de traceurs, à savoir Samsung, Tile, Chipolo, Eufy Security et Pebblebee, se sont joints au projet. L'objectif est de faire en sorte que toutes les balises soient détectables par tous les smartphones, quel que soit leur système d'exploitation (voir notre article). En espérant que cela résoudra le problème une bonne fois pour toutes...