Addiction aux écrans et aux réseaux sociaux : une loi pour un retour au téléphone fixe

Addiction aux écrans et aux réseaux sociaux : une loi pour un retour au téléphone fixe

Dans le sillage de la restriction d'Internet à 3 Go par semaine, un député propose une loi prônant la limitation du smartphone et le retour au téléphone fixe pour réduire les ravages des écrans et des réseaux sociaux sur les jeunes.

Il y a quelques jours, Najat Vallaud-Belkacem jetait un véritable pavé dans la mare du paysage numérique français avec une proposition choc qui a fait couler beaucoup d'encire – ou plutôt de pixels. Dans une tribune publiée le 18 mars 2024 dans Le Figaro, l'ancienne ministre de l'Éducation nationale suggérait de rationner la consommation d'Internet des Français afin de se libérer de l'addiction au d'écrans et de la dictature des réseaux sociaux. Avec une mesure aussi simple que radicale : limiter la quantité de données utilisée par chaque individu à 3 Go par semaine. 

De nombreuses voix – souvent moqueuses – se sont aussitôt élevées dans la presse et sur le Net pour expliquer, calculs à l'appui, que ce volume de data était totalement ridicule et même complètement déconnecté de la réalité, puisqu'il suffirait à peine à regarder une heure de vidéo en haute définition sur Netflix ou à passer 3 heures sur TikTok. Et si d'autres estimations permettent d'envisager un usage plus modéré des réseaux sociaux et d'Internet, la proposition volontairement provocatrice de Najat Vallaud-Belkacem a surtout eu l'effet escompté, à savoir ouvrir le débat sur te temps consacré aux écrans dans notre société, et sur la dépendance qui en découle, notamment sur les jeunes. 

Et il n'aura pas fallu attendre bien longtemps pour que d'autres s'engouffrent dans cette brèche, avec des propositions encore plus étonnantes. C'est le cas du député (non-inscrit) Jean-Baptiste Quenin-Blache qui s'est fendu dans la foulée d'une lettre adressée à Marina Ferrari, la nouvelle secrétaire d'État chargée du Numérique, lettre dans lequel il expose une mesure pour le mois audacieuse : l'interdiction pure et simple des smartphones et autres appareils connectés (ordinateurs, tablettes, etc.) aux mineurs en France !

Dans le courrier que nous avons pu examiner, le député explique que cette mesure drastique permettrait de "désintoxiquer durablement notre jeunesse des écrans et de la désinformation que véhiculent les réseaux sociaux, ces plateformes commerciales qui servent exclusivement des intérêts privés, en détournant des esprits non formés au prétexte de divertissement sous couvert de liberté". Il poursuit en affirmant que cette coupure totale serait propice à un retour vers des activités intellectuelles et physiques plus saines, en favorisant la lecture (de livres), la concentration, la pratique du sport, la pratique artistique et les discussions en famille. Et en soulignant que cette mesure accompagnerait parfaitement la généralisation de l'uniforme à l'école, cette "tenue unique" souhaitée par le président Emmanuel Macron, qui fait déjà l'objet d'expérimentations dans des établissements scolaires volontaires. Toujours selon Jean-Baptiste Quenin-Blache, elle soutiendrait également l'apprentissage des matière constituant le socle de l'enseignement voulu par Gabriel Attal, quand il était encore ministre de l'Éducation nationale, 

Pour autant, le député n'oublie pas le besoin de communications essentielles. Et pour que les enfants puissent communiquer avec leur famille, leurs amis, leurs enseignants ou tout autre service en cas de besoin, il suggère de revenir tout simplement.. au téléphone fixe ! Un discours qu'il argumente en s'appuyant sur les travaux du professeur Ian Morac de l'université Holdsworth, à Bradford, en Grande-Bretagne, à l'origine du mouvement "home phone" (littéralement téléphone maison) qui fait déjà de nombreux Outre-Manche et Outre-Atlantique dans les milieux néo-progressistes – rappelons que, comme d'autres patrons de la Silicon Valley, Steve Jobs, le fondateur d'Apple, et Bill Gates, le créateur de Microsoft, interdisaient à leurs enfants d'utiliser des ordinateurs, des tablettés et des smartphones, pour qu'ils grandissent sans pollution numérique…

"Ils feront comme nos parents et nous", ajoute Jean-Baptiste Quenin-Blache, "en téléphonant uniquement quand c'est nécessaire", précisant qu'il faudrait également réinstaller des téléphones publics dans des cabines, pour les situations d'urgence. "Galilée n'utilisait pas d'ordinateur, Bach n'avait pas de téléphone, Einstein ne connaissait pas Internet, et cela ne les a pas empêchés de changer le monde", conclut le député, en s'autorisant une comparaison peu flatteuse avec les apports des influenceurs à l'Humanité. 

Difficile de dire, à ce stade, si cette proposition audacieuse saura retenir l'attention dans les ministères et à l'Assemblée nationale, mais nul doute que la lettre du député suscitera de nombreuses réactions indignées et railleuses sur les réseaux sociaux, comme en témoignent les premiers commentaires qui évoquent "un délire de boomer halluciné" pour un retour à l'Âge de pierre.