T411 : une amende record d'un demi-milliard d'euros pour le site pirate

T411 : une amende record d'un demi-milliard d'euros pour le site pirate

Les créateurs du célèbre site de liens torrent, qui permettait de télécharger illégalement des films, séries, musiques et jeux vidéo, viennent d'écoper d'une amende de 989 millions d'euros. Une condamnation d'une ampleur exceptionnelle en France !

Sale temps pour les services de téléchargement illégal ! Après la fermeture d'Uptobox, une des plateformes les plus utilisées pour conserver et partager du contenu piraté, à la suite d'une descente de police (voir notre article), c'est au tour du feu T411, définitivement fermé en 2017, de subir les conséquences de la lutte anti-piratage. Le 13 octobre 2023, le tribunal correctionnel de Rennes a infligé une amende record de 491 millions d'euros aux administrateurs de l'annuaire de torrents, qui permettait de télécharger des films, séries et albums musicaux, comme le rapporte l'Informé. Jamais une condamnation de cette ampleur n'avait été prononcée en France dans un tel dossier. Une décision à la hauteur de la popularité de la plateforme, la justice cherchant à faire de T411 un exemple.

T411 : la fin des pages jaunes du Torrent

Les origines de T411, qui répondait alors au nom de QuebecTorrent, remontent à 2006. Surnommé "les pages jaunes du Torrent", le service fonctionnait comme un annuaire, en regroupant des milliers de liens menant vers de petits fichiers torrents. En les ouvrant, on pouvait alors récupérer de volumineux contenus de toutes sortes, comme des films, des séries, des jeux vidéo, de la musique ou encore des livres. Les échanges se faisaient directement entre les internautes, le site ne servait que d'intermédiaire, comme une sorte de plaque tournante du piratage. T411 est rapidement devenu très populaire, comptant des millions de membres, alors que le piratage en pair à pair (peer to peer) avait la côte, et ce au nez à la barbe d'Hadopi, l'éphémère et surtout inefficace outil du Gouvernement pour tenter d'endiguer le piratage. Au fil des années, les administrateurs changent de noms de domaine, de pays d'hébergement et clonent leur site pour contrer les blocages.

En septembre 2014, le parquet de la juridiction inter-régionale spécialisée de Rennes (JIRS) ouvre une information judiciaire des chefs de contrefaçon, association de malfaiteurs et blanchiment à l'encontre du site. En 2014, la justice française oblige les fournisseurs d'accès Internet à bloquer ses adresses, sans grand succès, et le jeu du chat et de la souris se poursuit. L'aventure s'achève finalement en 2017 avec l'intervention de la police suédoise, qui obtient la fermeture physique de l'annuaire de torrents et arrête le principal administrateur. Au total, depuis son lancement, le site aurait généré plusieurs millions d'euros de revenus, notamment issus de recettes publicitaires.

Deux accusés ont été ciblés au courant de l'affaire : M. Jolicoeur, créateur du site, et M. Voitenko, administrateur système. En plus des 489 millions de dommages et intérêts – 471 millions d'euros pour le secteur du cinéma, dont Gaumont, Pathé, UGC, Warner et Film24, et 18 millions d'euros pour le secteur de la musique, essentiellement via la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) –, le créateur du site écope de trois ans de prison ferme et 150 000 euros d'amende, et l'administrateur de dix-huit mois de prison, dont treize avec sursis. Ce dernier, présent au procès et ayant déjà purgé cinq mois d'emprisonnement, a été libre de partir, tandis qu'un mandat d'arrêt a été émis pour son comparse, actuellement réfugié au Canada. Il s'agit de la plus lourde peine jamais prononcée en France pour une affaire de téléchargement illégal. M. Voitenko prévoit d'ores et déjà de faire appel.