La 5G fait un flop en France : pourquoi tout le monde s'en fout

La 5G fait un flop en France : pourquoi tout le monde s'en fout

Cinq ans après son lancement, la 5G est loin d'avoir conquis le cœur des Français. Pire, c'est un gouffre financier pour les opérateurs, alors que les utilisateurs ne ressentent aucun changement majeur dans leur quotidien.

L'arrivée de la 5G a bouleversé le secteur des télécoms, promettant notamment des vitesses de connexion bien supérieures à celles de la 4G. Pourtant, cinq ans après son lancement commercial, la technologie peine à convaincre – tant du côté des utilisateurs que des opérateurs eux-mêmes. Pourtant, la France, comme beaucoup d'autres pays, a consacré des sommes colossales au déploiement de la 5G. On parle de plus de 11 milliards d'euros dépensés jusqu'à présent pour répondre aux obligations de couverture et moderniser les réseaux. Malheureusement, malgré les milliards investis, la magie n'a pas eu lieu. Les consommateurs ne voient pas de différence tangible, les opérateurs éprouvent des difficultés à rentabiliser leurs investissements, et les usages révolutionnaires tardent à émerger, malgré des performances techniques bien réelles.

Flop de la 5G : une technologie qui a du mal à convaincre

En France, les opérateurs ont déjà injecté plus de 11 milliards d'euros dans le déploiement du réseau 5G, en ajoutant à l'enchère initiale des fréquences des budgets massifs pour installer antennes et infrastructures — et ce n'est pas fini, puisqu'il faudra couvrir la totalité du territoire d'ici 2030. Or, sur la même période, le chiffre d'affaires national du mobile est passé de 13,3 à 14,9 milliards – une croissance certes positive, mais insuffisante pour couvrir l'ampleur des dépenses engagées. Bref, c'est un mauvais retour sur investissement.

Du côté des utilisateurs, le bilan est mitigé. Fin juin 2025, l'Arcep comptait environ 51,9 millions de cartes SIM actives en 4G, dont 28,4 millions accédant également au réseau 5G. Malgré le discours marketing, peu de personnes signalent de différences majeures dans leur utilisation quotidienne. Le fameux "bond en avant" n'a pas eu lieu pour la majorité des usages (streaming, navigation, messagerie), à l'exception de certaines zones très denses ou pour certains usages professionnels, où la 5G apporte alors un gain de débit ou de latence. Mais cela ne suffit pas à pousser le grand public à s'y intéresser réellement.

Du côté des opérateurs, l'amertume est palpable. L'un d'eux, Bouygues Telecom, a admis auprès de La Tribune avoir "surpromis" la 5G et ambitionne de ne pas réitérer cette erreur lors du passage à la 6G. Le retour sur investissement tarde à apparaître, surtout dans un contexte de marché saturé et d'usages peu différenciés. Leurs coûts d'infrastructures et de maintenance restent élevés, sans que le public ne soit prêt à payer un plus-prix significatif – d'autant que les forfaits 5G sont souvent vendus au même tarif que les meilleurs forfaits 4G.

Flop de la 5G : quelles sont les raisons de cet échec ?

La 5G est une technologie si complexe qu'il a fallu la déployer graduellement. Or, une part du sentiment de "flop" tient aussi à un flou technique : la différence entre la 5G "normale " (dites NSA, pour Non-Standalone) et la "vraie" 5G (dites 5G SA ou 5G +). Afin de couvrir très rapidement le territoire, la 5G s'est appuyée, à son lancement en 2020, sur les infrastructures 4G existantes : c'est la 5G NSA.  Cela a pour conséquence de limiter les gains en latence ou en efficacité. La 5G SA, en revanche, dispose d'un cœur réseau propre, sans dépendance à la 4G. 

Résultat : les performances sont bien supérieures à la 5G standard, et le réseau est donc plus réactif, avec une latence réduite et un niveau de sécurité renforcé grâce au chiffrement des données d'identification de la carte SIM. Jusqu'à présent, seuls Free Mobile, Orange et, depuis cet été, Bouygues Telecom proposent la 5G+ à leurs clients particuliers – en plus, le passage à cette technologie n'est pas toujours automatique, il nécessite parfois une activation manuelle depuis l'espace abonné.

Un autre facteur d'indifférence : les utilisateurs ne perçoivent pas de problème pressant à résoudre. Le réseau 4G couvre déjà très bien l'essentiel des usages – regarder une vidéo, utiliser une application, naviguer sur Internet. Le gain de confort que promet la 5G (meilleurs débits, latence plus basse) reste marginal pour l'immense majorité, surtout en zone urbaine dense où les différences sont difficiles à déceler. Du coup, l'adoption tarde, et les consommateurs ne voient pas pourquoi ils devraient changer – les habitudes ont la vie dure. 

En parallèle, des défis techniques et économiques persistent : la consommation énergétique – qu'on espérait maîtrisée –, les coûts d'entretien, la densification du maillage d'antennes – notamment dans les zones peu denses –, et la compatibilité des terminaux avec la 5G SA – la 5G+ a pendant longtemps été compatible uniquement avec nombre restreint de terminaux Android – freinent la généralisation.

Si nier toute valeur à la 5G serait excessif, la conclusion à tirer de cette histoire est que le grand public est plus attaché au bon fonctionnement d'un réseau mobile stable plutôt qu'à sa vitesse extrême. Une technologie ne convainc vraiment que lorsque ses avantages se perçoivent dans le quotidien. Or, pour l'heure, la 5G reste trop souvent invisible.