Adobe est poursuivi en justice pour ses abonnements trompeurs et difficiles à résilier

Adobe est poursuivi en justice pour ses abonnements trompeurs et difficiles à résilier

Adobe, le célèbre éditeur de Photoshop et d'autres solutions graphiques, est accusé de piéger ses clients avec ses abonnements mensuels, en dissimulant les frais de résiliation et en rendant la démarche inutilement complexe.

Depuis trente ans maintenant, Adobe domine le marché du graphisme avec ses logiciels emblématiques tels que Photoshop, InDesign, Illustrator et Premiere. Autant de produits phares qui font office de références dans leurs domaines respectifs, et qui sont devenus pratiquement incontournables pour bon nombre de professionnels, au détriment de concurrents moins populaires. Initialement, l'entreprise venait ses produits sous la forme classique d'une licence à vie, en effectuant régulièrement de grandes mises à jour payantes.

Mais à l'instar d'autres éditeurs, Adobe a changé de modèle économique en adoptant le système d'abonnement, comme Microsoft le fait avec sa suite bureautique Office. Sauf que l'entreprise américaine a poussé le bouchon encore plus loin en supprimant purement et simplement la formule d'achat définitif pour proposer uniquement de la location, contraignant ainsi les utilisateurs à souscrire à un abonnement. Or, les différentes formules sont loin d'être abordables, et de nombreux professionnels et étudiants, lorsqu'ils débutent, ne peuvent tout simplement pas se les offrir. La situation est encore plus problématique pour ceux qui souhaitent pouvoir utiliser les nouveaux outils dopées à l'IA Firefly, qui nécessitent des crédits payants supplémentaires

Face à ses pratiques commerciales controversées, Adobe se retrouve dans le collimateur du Département de la Justice (DOJ) des États-Unis. En effet, la Federal Trade Commission (FTC) – une agence indépendante non gouvernementale américaine qui veille à l'application du droit de la consommation et au contrôle des pratiques commerciales anticoncurrentielles – poursuit l'éditeur de logiciels pour la difficulté d'annuler un abonnement et la dissimulation de frais de résiliation. Elle accuse l'entreprise d'avoir "nui aux consommateurs en les inscrivant à son plan d'abonnement par défaut, le plus lucratif, sans divulguer clairement les conditions importantes du plan".

Abonnements Adobe : frais de résiliation cachés et résiliation compliquée

La FTC s'attaque aux frais qu'un utilisateur doit payer lorsqu'il résilie son abonnement à la formule annuelle payée mensuellement avant l'échéance de fin. En effet, passés les quatorze premiers jours, il doit s'acquitter de 50 % du coût restant de son abonnement. Par exemple, s'il arrête sa souscription au bout de quatre mois, il devra payer 50 % des huit mois restants. Ce fonctionnement est également valable en France. Pour la FTC, ces conditions d'annulation sont insuffisamment mises en avant dans les contrats de licence, reléguées dans de "petits caractères et derrière des zones de texte facultatives et des hyperliens". Bref, l'entreprise pousse ses clients vers son abonnement annuel, en les privant délibérément d'une compréhension limpide des frais de résiliation anticipée, qui peuvent s'élever à des centaines de dollars.

© Adobe

En plus de ces frais cachés, Adobe est accusé d'entraver volontairement la résiliation des abonnements au niveau des démarches en ligne afin de décourager les clients de mettre un terme à leur abonnement. En effet, lorsqu'ils s'y risquent, l'éditeur leur impose une procédure de résiliation d'une grande complexité, avec de multiples pages Web et fenêtres contextuelles. Et c'est la même chose lorsqu'ils passent par voie téléphonique ou via des sessions de chat en direct. "Les abonnés ont vu leurs appels ou chats interrompus ou déconnectés et ont dû réexpliquer la raison de leur appel lors de la reconnexion", note la FTC. Pire encore,"certains consommateurs qui pensaient avoir annulé leur abonnement avec succès ont signalé que l'entreprise a continué à les facturer jusqu'à la découverte de frais sur leurs relevés de carte de crédit".

"Adobe a piégé les clients dans des abonnements d'un an grâce à des frais de résiliation anticipée cachés et de nombreux obstacles à la résiliation. Les Américains en ont assez des entreprises qui cachent les conditions lors de l'inscription aux abonnements puis dressent des obstacles lorsqu'ils essaient de résilier", a déclaré Samuel Levine, directeur du Bureau de la protection des consommateurs de la FTC. Cette dernière a déposé une plainte auprès du tribunal fédéral californien qui cible également, de manière directe, les dirigeants d'Adobe, en l'occurrence Maninder Sawhney, vice-président senior du marketing numérique et des ventes, ainsi que David Wadhwani, président de la division médias numériques de la société. Elle demande des sanctions financières contre l'éditeur de Photoshop ainsi que l'arrêt des pratiques incriminées.

Abonnements Adobe : la justice américaine s'en mêle

Bien évidemment, Adobe réfute les accusations de la FTC. "Les services d'abonnement sont pratiques, flexibles et rentables pour permettre aux utilisateurs de choisir le forfait qui correspond le mieux à leurs besoins, à leur calendrier et à leur budget", assure l'entreprise dans un communiqué. "Notre priorité est de toujours garantir à nos clients une expérience positive. Nous sommes transparents avec les termes et les conditions de nos contrats d'abonnement et nous disposons d'une procédure d'annulation simple."

L'entreprise est particulièrement dans la tourmente en ce moment. Outre cet épisode judiciaire, elle est au cœur d'une polémique concernant ses nouvelles mentions légales, qui autorisent l'éditeur à accéder aux contenus des utilisateurs stockés dans le Creative Cloud. En cas de refus, les utilisateurs n'ont tout simplement plus accès aux logiciels. Adobe justifie cette décision par la nécessité de détecter du contenu délictueux, mais aussi pour "développer et améliorer nos produits et services, ce qui nous permet de proposer des solutions innovantes d'avant-garde". De quoi faire craindre qu'il utilise les créations des utilisateurs pour entraîner son IA, même s'il assure que ce n'est pas le cas.

Rappelons que des alternatives gratuites ou à bas prix existent aujourd'hui, ce qui risque de faire perdre des clients à Adobe. Ainsi, du côté des éditeurs de photos, on peut se tourner vers Photopea ou Affinity Photo 2un logiciel de création graphique professionnel qui concurrence très fortement Photoshop et Illustrator depuis quelques années. Il propose des prix vraiment concurrentiels par rapport à Adobe. Pour le montage vidéo, DaVinci Resolve fait totalement l'affaire. Adobe n'a plus le monopole !