Assurance multimédia : au bord du gouffre, la SFAM pourrait ne jamais rembourser ses anciens clients
La sulfureuse Société Française d'Assurances Multirisques, la SFAM, est acculée de toutes parts et pourrait bientôt se retrouver en liquidation judiciaire, au grand dam de ses clients lésés et de ses salariés.
Les nuages s'accumulent au-dessus d'Indexia Group, plus connu sous le nom de Société Française d'Assurances Multirisques, ou SFAM, une entreprise de courtage en assurance affinitaire pour appareils multimédia, qui fait actuellement l'objet de plusieurs plaintes et pourrait très prochainement se retrouver en redressement, voire en liquidation judiciaire. Fondée par l'homme d'affaires Sadri Fegaier en 1999, la SFAM a connu une expansion fulgurante à partir de 2016 qui s'est traduite par une diversification de ses activités, notamment dans la vente de produits multimédias, comme les smartphones ou les enceintes, via sa filiale Hubside Store dont les magasins ont poussé comme des champignons depuis 2020 (voir notre article). Mais ce qui aurait pu être une "success story" entrepreneuriale à la française s'est révélée être une histoire bien moins reluisante, sur fond de pratiques commerciales "trompeuses et agressives", selon les termes de l'association UFC-Que Choisir.
À partir de 2016 et durant des années, la SFAM s'est en effet appliqué à refourguer, il n'y a pas d'autres termes, des produits d'assurances pour appareils multimédias, notamment des smartphones, aux clients de grandes enseignes de distribution, comme la Fnac-Darty, avec lesquelles elles avaient noués des partenariats commerciaux. Concrètement, lors de l'achat d'un produit, les vendeurs de ces magasins étaient fortement incités à proposer aux clients des offres alléchantes de remboursement partiel, lesquelles étaient conditionnées à la souscription d'un contrat d'assurance auprès de la SFAM. Le problème, c'est que ces conditions et contrats n'étaient pas toujours clairement exposés aux acheteurs, qui y souscrivaient sans vraiment en avoir conscience et se retrouvaient alors prélevés de sommes allant d'une quinzaine à plus de soixante euros par mois.
Affaire SFAM : un procès pour une fin annoncée
Mais les choses ne s'arrêtent pas là. En plus de vendre des produits d'assurance de façon peu transparente, la SFAM est également accusée par de nombreux plaignants d'avoir rendu le processus de résiliation des contrats excessivement difficile, voire d'ignorer sciemment les demandes de résiliation. Conséquence, certains clients continuaient d'être prélevés régulièrement alors qu'ils avaient effectués en bonne et due forme toutes les démarches nécessaires à l'annulation de leur assurance. Pire, l'entreprise a plusieurs fois été épinglée pour avoir mis en place, unilatéralement, de nouveaux contrats auprès d'anciens clients dont elle possédait encore les RIB, ce qui a entraîné des prélèvements sauvages et abusifs pour de très nombreuses personnes, comme nous le relations dans cet article. Si cette pratique douteuse semble en pleine recrudescence depuis le mois de janvier 2024, s'est peut-être parce que la SFAM se trouve au pied du mur, à la fois sous le coup d'une interdiction de commercialiser tout nouveau contrat d'assurance depuis un an, et faisant l'objet de plaintes de plusieurs créanciers pour des sommes astronomiques.
Premièrement, l'Urssaf Rhône-Alpes réclame à l'entreprise plus de 11 millions d'euros d'arriérés de cotisations sociales, auxquels s'ajoutent plus d'un millions euros qui seraient dû au fisc. Ensuite, de nombreux salariés de la SFAM seraient victimes de "retards" dans le versement de leurs salaires et de leurs primes depuis plusieurs mois, avec les conséquences individuelles catastrophiques qu'on imagine pour les personnes concernées. Enfin, un recours collectif réunissant plusieurs centaines d'anciens clients s'estimant lésés par les pratiques commerciales de l'entreprise, et réclament des remboursements, s'ajoute à la liste des griefs. Acculée de toutes parts, la SFAM est donc sur la sellette, et son sort pourrait être scellé dans les prochains jours. En effet, le 24 avril prochain, le tribunal de commerce de Paris devra se prononcer sur la plainte de l'Urssaf Rhône-Alpes, et pourrait décider du placement de l'entreprise en redressement judiciaire, voire carrément en liquidation.
Si cette audience mettra peut-être un terme à cette mauvaise farce qui dure depuis maintenant près de dix ans, son issue risque en revanche de ne pas contenter toutes les parties lésées et de laisser certains plaignants sur le carreau. En cas de liquidation judiciaire, tous les actifs de la société seraient vendus et les sommes ainsi récoltées seraient redistribuées entre les différents créanciers. Malheureusement, à la vue des montants réclamés par les différents plaignants, il est peu probable que la cession des actifs permettent de couvrir toutes les demandes. Dans de pareils cas, le liquidateur judiciaire se trouve alors contraint d'effectuer un arbitrage entre les différents créanciers, avec une priorité donné aux salariés et aux organismes publics. Si la liquidation devrait être prononcée la semaine prochaine, il y a donc de fortes chances que les anciens clients soient parmi les derniers servis, et qu'un bon nombre d'entre eux n'obtiennent jamais le remboursement des sommes indûment prélevées sur leur compte…