Manifest V3 Google : Chrome va-t-il tuer les bloqueurs de pub ?

Manifest V3 Google : Chrome va-t-il tuer les bloqueurs de pub ?

Pour améliorer son navigateur Chrome, Google va bientôt modifier la façon dont les extensions doivent fonctionner. Un changement bénéfique en principe, mais qui pourrait fortement nuire aux bloqueurs de publicité.

Google va-t-il tuer les bloqueurs de publicité ? On peut se poser la question quand on sait que la pub est la principale source de revenus du géant d'Internet, notamment à travers les annonces diffusées dans son moteur de recherche et ses différents services. Et tout ce qui empêche l'affiche des pubs sur le Web entraîne inévitablement un manque à gagner. Google vient d'ailleurs de durcir sa politique sur sa plateforme YouTube, en empêchant la lecture de vidéos quand un ad-blocker est détecté, ce qui ne manque pas d'agacer les utilisateurs (lire notre article). Et les choses pourraient bien devenir encore plus compliquées en 2024, cette fois directement dans Chrome, son navigateur maison. Un outil essentiel pour l'Américain, que ce soit sur ordinateur ou sur mobile.

Toutefois, s'il caracole toujours en tête du classement avec près de 65 % de parts de marché( loin devant Safari avec 19,5 % et Edge et ses 4,5 %) au dernier relevé effectué par StatCounter en mai 2023, Chrome est souvent pointé du doigt pour sa consommation boulimique de ressources, notamment en mémoire, et pour ses indiscrétions – il récolte énormément de données pour Google, qui les monétise. Depuis quelque temps, Google s'attache à améliorer son navigateur – par exemple, en mettant les onglets inactifs en veille, comme c'est le cas dans les dernières versions. Mais le géant veut également prendre d'autres mesures dont certaines pourraient impacter directement les extensions, et plus particulièrement les bloqueurs de publicité. 

Manifest V3 Google : un changement drastique de règles 

Google travaille en effet depuis plus de quatre ans à revoir le mode de fonctionnement des extensions pour Chrome. Et un changement majeur devrait intervenir en 2024 avec la transition du Manifest V2 vers le Manifest V3. Le Manifest, c'est une sorte de cahier des charges qui définit les règles que les extensions Chrome doivent respecter pour fonctionner (comportement, accès et permissions, déclenchement, exécution de scripts en arrière-plan, etc.).

Or, si le Manifest V2 en place depuis 2012 se montrait assez généreux pour laisser un champ d'action plutôt large aux extensions, le Manifest V3 se montre bien plus restrictif, notamment sur le blocage de contenu à la volée. Car les premières extensions à en souffrir sont celles dédiées au blocage des publicités telles que AdBlock, uBlock ou encore AdGuard pour n'en citer que quelques-unes. Ces extensions emploient en effet de très nombreuses règles pour filtrer de façon dynamique les contenus affichés dans les pages Web. uBlock Origin par exemple en contiendrait plus de 300 000. Or, avec la nouvelle version du Manifest, le nombre maximal serait fixé à 30 000 afin de garantir plus de souplesse au navigateur et de meilleures performances. De quoi au passage rendre les bloqueurs de pub bien moins efficaces.

© Google

Google avait déjà présenté les contours du Manifest V3 l'an passé. Les restrictions étaient alors encore plus strictes avec un nombre de règles maximum fixé à 5000. Suite au tollé général, la firme avait mis en pause son développement afin de prendre le temps de consulter les développeurs. Avant de revenir à la charge en cette fin d'année avec "une amélioration de la prise en charge du filtrage de contenu en fournissant des limites plus généreuses" selon ses propres termes. Du côté d'AdGuard, on semble se féliciter de ce pas en avant. Les développeurs des autres bloqueurs de pub gardent le silence pour le moment. Il reste donc du chemin à parcourir pour que tout le monde y trouve son compte… et rapidement. Google a en effet annoncé que les préversions de Chrome 127 prévues au mois de juin 2024 désactiveront les extensions basées sur le Manifest V2 (la version actuelle). Il ne sera plus possible de les utiliser et encore moins de les récupérer et de les installer depuis le Chrome WebStore. On risque fort de voir la boutique d'extensions de Chrome se vider promptement.