Les Belges savent mieux compter que les Français (ils sont beaucoup plus logiques)

Les Belges savent mieux compter que les Français (ils sont beaucoup plus logiques)

Si l'on met l'accent de côté, les Belges francophones parlent le même français qu'en France. Enfin presque. Car ils s'en distinguent dans le domaine des nombres, où ils se montrent beaucoup plus logiques que les Français.

S'il est moins répandu que l'anglais , le français est tout de même parlé par près de 500 millions de personnes répartis dans 112 pays et territoires à travers le monde. Pour autant, tous ces francophones ne parlent exactement de la même manière. En plus des accents, extrêmement variés, les mots changent légèrement d'un pays à l'autre, parfois même d'une région à l'autre. Ce n'est jamais un problème : cela montre simplement que la langue vit et s'adapte.

La Belgique, par exemple, partage l'essentiel du français de France, mais garde quelques habitudes qui lui sont propres. Au-delà de l'accent souvent caricaturé – qui est en réalité l'accent des Bruxellois – et nombreuses expressions typiques – "elle attend famille" pour "elle est enceinte", "avoir la clope" pour "avoir peur", "être bleu" pour "être amoureux", "il fait son nez" pour 'il est prétentieux", etc. –, les Belges francophones se distinguent des Français par leur façon de compter.

En pratique, les nombres se disent exactement de la même façon dans les deux pays jusqu'à 69 : un, deux, trois… soixante-huit, soixante-neuf. Mais tout change après. 70 se dit soixante-dix en France et septante en Belgique. Et il en va de même jusqu'à 99. 80 se disant quatre-vingt d'un côté et octante de l'autre, et 90 se prononçant quatre-vingt(dix ou nonante selon le pays, avec toutes les déclinaisons associées – soixante-treize ou septante-trois pour 73, quatre-vingt-cinq ou octante-cinq pour 85 ou encore quatre-vingt-dix-sept ou nonante-sept pour 97.

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Cette différence très caractéristique traduit en fait deux visions du dénombrement. Elle tient à des raisons historiques. En France, le système vigésimal, fondé sur le vingt, s'est imposé sous l'influence de l'Académie française au XVIIᵉ siècle. Il découle d'une tradition médiévale nourrie par des usages gaulois et nordiques qui s'est progressivement généralisée dans tout le pays. La Belgique, elle, est restée fidèle à au système décimal hérité du latin, septante venant de septuaginta et nonante de nonaginta.

Et force est de constater que même si nous y sommes habitués, le système français est beaucoup plus complexe que le belge, qui suit une logique très simple : quarante, cinquante, soixante, septante, octante, nonante. En français de France, il faut se faire des nœuds au cerveau quand on apprenant à compter, avec cet étrange découpage après 69 : 70 pensé comme 60 + 10, 80 vu comme 4 x 20, et 90 transformé en 4 x 20 + 10. Pas étonnant que de nombreux enfants peinent à l'école en abordant ces grands nombres !

Et ce n'est pas par hasard si les Suisses, dans leur grande sagesse, ont également adopté le système décimal belge, tout comme certains pays d'Afrique francophone : la simplicité de septante et nonante séduit pour des raisons pédagogiques, en facilitant la traduction, l'apprentissage et la prononciation.

Il est normal langue évolue. C'est même le principe d'une langue vivante. Et si certaines réformes récentes sont discutables, il serait peut-être bon que que les académiciens se penchent sur cette question de dénombrement et que les Français adoptent le système belge, plus simple et plus logique. Pour l'heure, c'est un peu l'inverse qui se produit, octante laissant désormais place à quatre-vingt en Belgique. Mais qui sait ? La simplicité finira peut-être un jour par l'emporter !