Disrupt : un outil pour lutter contre le revenge porn

Disrupt : un outil pour lutter contre le revenge porn

Pour lutter contre le revenge porn et ses ravages, l'association Point de Contact a mis en place Disrupt, un outil de signalement visant à prévenir et à limiter la diffusion non consentie de contenus intimes, y compris de façon proactive.

Le numérique a pris une place importante dans notre sexualité, en particulier chez les adolescents et les jeunes adultes. S'envoyer des sextos et des nudes est aujourd'hui devenu un moyen de séduire, de nourrir sa relation et de partager encore plus d'intimité avec son ou sa partenaire. Malheureusement, ces nouvelles pratiques entraînent parfois la violation de la vie privée et la diffusion non consentie de contenus intimes. Une histoire d'amour avec un jeune garçon finit mal, et ce dernier divulgue alors des photos de son ex-petite amie sur les réseaux sociaux et auprès de ses camarades de classe : c'est un scénario classique d'un cas de revenge porn. Que ce soit par vengeance, pour obtenir de l'argent – c'est ce qu'on appelle de la sextorsion (voir notre article) – ou juste pour s'amuser – en montrant les images à ses amis par exemple –, cette pratique odieuse devient de plus en plus fréquente chez les adolescents et peut conduire à du harcèlement, si ce n'est un suicide. Et ce n'est pas le développement des deepfakes qui va arranger ce phénomène (voir notre article) ! 

Pourtant, il s'agit d'un délit puni par la loi. L'article 226-2-1 du Code pénal stipule en effet que "le fait, en l'absence d'accord de la personne pour la diffusion, de porter à la connaissance du public ou d'un tiers tout enregistrement ou tout document portant sur des paroles ou des images présentant un caractère sexuel, obtenu, avec le consentement exprès ou présumé de la personne ou par elle-même" est puni de deux ans d'emprisonnement et de 60 000 euros d'amende. Cet acte est punissable même si la personne a donné son consentement à l'enregistrement initial de la vidéo ou des images. Le seul fait que la diffusion, notamment sur Internet et sur les réseaux sociaux, ait lieu sans le consentement de la personne suffit. Malheureusement, les procédures, lorsqu'elles sont engagées, sont longues et complexes pour des victimes dont la vie, personnelle comme professionnelle, est bouleversée. Aussi, l'association Point de Contact a dévoilé le 20 novembre le DISpositif d'interRUPTion de diffusion de contenus intimes (DISRUPT) qui, comme son nom l'indique, permet de signaler un contenu de revenge porn pour le faire supprimer, y compris de façon proactive.

Disrupt : un outil pour prévenir et limiter la diffusion de contenus intimes

Initié dans le cadre du laboratoire de la Protection de l'enfance, lancé fin 2022 par Emmanuel Macron, le projet Disrupt est né au sein de l'association Point de Contact, qui lutte contre les "dérives inhérentes à l'évolution et au développement d'Internet" depuis 1998. L'outil, accessible gratuitement en ligne, vise à prévenir et à limiter la diffusion de contenus intimes – des mineurs comme des majeurs – en améliorant le processus de détection grâce au signalement et à la signature numérique. 

Sur la plateforme Disrupt, toute victime de revenge porn peut signaler les liens des contenus illégaux, qui vont ensuite faire l'objet d'échanges entre l'association, Pharos et les plateformes qui les hébergent – qu'il s'agisse de réseaux sociaux ou de sites pornographiques – dans le but de les faire supprimer au plus vite. La démarche est très simple. Il suffit de remplir le formulaire disponible à cette adresse, en indiquant s'il s'agit de soi ou de quelqu'un d'autre, l'âge de la victime au moment des faits, son adresse mail – c'est facultatif, afin de pouvoir connaître l'évolution de son signalement –, divers éléments contextuels pour raconter ce qui s'est passé, et l'URL menant vers le contenu incriminé. Il est également possible d'envoyer, en joignant un fichier, le contenu qu'un tiers menace de diffuser ou qui a été diffusé sans que l'on ne sache où.

Pour cela, Point de Contact a recours au hachage, un moyen technique qui permet d'attribuer une signature numérique à une image ou à une vidéo. Cette signature est ensuite stockée dans la base de haches de l'association et est mise à disposition des plateformes et des acteurs partenaires. Les codes sont ensuite comparés à chaque image et vidéo – signalée à Point de Contact ou publiée sur une plateforme partenaire – et, s'ils correspondent, le contenu est supprimé, y compris de façon proactive, au moment de sa mise en ligne.

Revenge porn : l'importance de la sensibilisation

Face à ce fléau qui ruine des vies, la sensibilisation quant aux risques, à la gravité des faits et aux recours possibles est nécessaire dès le plus jeune âge. Pour ce faire, Point de Contact s'est associé à son partenaire Tralalère-Internet Sans Crainte et propose, depuis le 9 novembre, le serious game " Stop la violence !". À l'aide de quatre modules (Rumeur, Discrimination, Racket et Contenus intimes), cet outil pédagogique plonge le joueur au cœur d'un collège qui se trouve confronté à différentes situations de violence. Le jeu aborde la question du harcèlement scolaire de manière réaliste tout en stimulant l'empathie des joueurs, qui peuvent accéder aux témoignages des victimes. L'association fournit nombre de documents pédagogiques, afin de pouvoir organiser au mieux des ateliers – en classe par exemple.

On peut également trouver un formulaire de signalement si l'on est tombé sur un contenu choquant sur Internet (contenus à caractère sexuel mettant en scène des mineurs ou accessibles à des mineurs, incitation au suicide, proxénétisme, diffusion non consensuelle de contenu intime...), ainsi que de petites BD qui abordent différents sujets, comme le sexting, le grooming, etc. Une véritable mine d'or pour prévenir et pour agir !