Ces fruits vendus en supermarché ne sont pas du tout frais : ils ont parfois plus d'un an !

Ces fruits vendus en supermarché ne sont pas du tout frais : ils ont parfois plus d'un an !

Même s'ils sont au rayon frais avec des légumes de saison, les fruits vendus en grande surface et chez les primeurs n'ont pas tous été cueillis la veille. Certains datent même de plusieurs mois quand ce n'est pas d'une année entière…

C'est un fruit qu'on trouve partout, toute l'année, du petit marché local aux grandes surfaces. Rond, croquant, rassurant… la pomme ne manque jamais à l'appel, quelles que soient la région et la saison. Pourtant, celle que vous croquez en plein mois de juin a de grandes chances d'avoir été cueillie l'automne précédent… voire bien avant ! Sa fraîcheur n'est qu'apparente. Et elle n'a rien de naturel : elle résulte d'un procédé complexe, mis au point par l'industrie agro-alimentaire : c'est l'atmosphère contrôlée, capable de suspendre le temps.

Tout commence dès la récolte. Les pommes sont triées puis enfermées dans d'immenses chambres froides hermétiques. À l'intérieur, l'air est entièrement modifié : la teneur en oxygène chute drastiquement, souvent entre 0,5 % et 2 %, tandis que la température est maintenue à environ 1° C. Dans ces conditions, le fruit respire à peine, son métabolisme se met au ralenti. Il ne mûrit plus, ne se flétrit pas, et garde son aspect croquant pendant des mois.

Dans ces entrepôts modernes, les capteurs mesurent la moindre variation d'air ou d'humidité. Un excès d'oxygène, et le processus de maturation reprend ; un manque, et les fruits s'abîment. Les ingénieurs parlent d'un "équilibre fragile", un point précis entre vie et sommeil où la pomme cesse de vieillir sans pourrir.

© lado2016 - Adobe Stock

Mais même dans ce cocon, un danger subsiste : l'éthylène, un gaz naturel que les pommes produisent elles-mêmes et qui accélère leur maturation. Pour le neutraliser, certaines filières utilisent une molécule, le 1-MCP, qui bloque les récepteurs du fruit. Ce traitement agit comme un interrupteur chimique : il empêche la pomme de "sentir" son propre éthylène, prolongeant encore sa jeunesse.

Pourquoi de tels efforts ? Pour que les étals restent garnis toute l'année, que les prix soient stables et que la filière évite le gaspillage. Sans ces technologies, les pommes disparaîtraient des rayons dès le début de l'hiver. Les producteurs y trouvent aussi leur compte : les fruits sont écoulés au fil des mois, selon la demande, plutôt que tous en même temps à la récolte. Le consommateur, lui, continue d'avoir le choix, quitte à croquer un fruit cueilli des mois plus tôt.

Cette maîtrise du temps ne date pourtant pas d'hier. Bien avant les chambres froides et les capteurs électroniques, les paysans savaient déjà prolonger la vie de leurs récoltes. Les pommes, comme les pommes de terre, étaient stockées dans des caves fraîches, ventilées et sombres, parfois suspendues ou posées sur de la paille pour éviter l'humidité. Les variétés d'hiver, plus rustiques, pouvaient ainsi tenir jusqu'au printemps suivant. Ce savoir-faire ancestral a simplement été perfectionné par la technologie moderne.

Et les pommes ne sont pas seules à bénéficier de cette longue conservation. Les poires, les kiwis, certains agrumes peuvent eux aussi rester plusieurs mois en atmosphère contrôlée sans perdre leurs qualités. D'autres, plus fragiles (fraises, pêches, abricots, cerises…) refusent ce long sommeil : quelques jours suffisent à les altérer.