Cette mini série décapante révèle les secrets inavouables de la Silicon Valley

Cette mini série décapante révèle les secrets inavouables de la Silicon Valley

Le monde de la tech fascine autant qu'il inquiète. Dans une mini-série documentaire décapante, deux journalistes partent explorer le microcosme du berceau de l'informatique, la Silicon "Fucking" Valley.

Avec sa chemise Hawaïenne colorée et ses chaussettes bariolées, Luc Julia dénote dans un paysage habituellement dominé par les costumes cravates des capital-risqueurs et les cols roulés des gourous de la tech. C'est pourtant ce personnage insolite, l'un des concepteurs de l'assistant vocal Siri, qui va ouvrir les portes d'un monde aussi fascinant qu'inquiétant à deux journalistes d'Arte, celui de la Silicon Valley, berceau historique et locomotive actuelle de l'industrie informatique.

Avec son franc-parler détonnant, ses anecdotes croustillantes et une absence manifeste de gêne pour s'inviter un peu partout, Luc Julia va ainsi permettre à ses deux compères et aux téléspectateurs de lever une partie du voile de mystère qui recouvre cet univers objet de tous les fantasmes. Cette mini-série, visionnable gratuitement sur Arte et composée de six épisodes d'une quinzaine de minutes chacun, sera d'ailleurs baptisée selon les propres mots du guide : Silicon Fucking Valley.

Au fil des pérégrinations de nos trois loustics, ce sont plusieurs lieux, personnages et entreprises emblématiques de la vallée du silicium qui nous seront présentées sous différents aspects. On y découvrira par exemple l'histoire de la prestigieuse université de Stanford, en Californie, qui a vu passer sur ses bancs la plupart des grands inventeurs et entrepreneurs technologiques de ces dernières décennies, grâce à un modèle d'intégration étroit entre le monde universitaire et industriel.

On partira également à la rencontre d'un ingénieur français en fibre optique, reconverti en YouTuber spécialisé dans la réparation de vieux ordinateurs. Un tremplin parfait pour enchaîner sur la passionnante histoire du développement des ordinateurs personnels grand public, et notamment du Xerox Alto, le premier de sa catégorie à offrir une véritable interface graphique, en lieu et place des lignes de commande qui régnaient à l'époque. Et sur le concept duquel se bâtira l'immense succès d'un autre constructeur : Apple.

La mini-série reviendra d'ailleurs longuement sur le développement fulgurant de la marque à la pomme, sous l'impulsion de son visionnaire, et parfois tyrannique, directeur Steve Jobs, entre rachats d'entreprises innovantes bien sentis et intuitions fulgurantes sur le développement de l'informatique grand public. C'est à cette occasion que Luc Julia mentionnera l'existence d'une photo très intime de Steve Jobs, mais dont l'origine ne nous sera livrée qu'à la toute fin de la série.

Chaque épisode est centré sur une période ou un aspect du fonctionnement de cette « micro-nation » qu'est la Silicon Valley. Des ingénieurs stars grassement payés aux employés de transport et de restauration exploités, en passant par les investisseurs discrets ou les patrons de restaurant loufoques, la mini-série nous fait découvrir la galaxie de personnages qui peuplent ce monde étrange, presque un univers parallèle au notre, avec « ses lois, ses rois et son histoire ».

La série ne se prive d'ailleurs pas d'exposer des aspects plus sombres et problématiques de l'éclatante réussite de la Silicon Valley. On y entendra par exemple la voix rare et dissonante de Meredith Wittaker, l'actuelle présidente de la Fondation Signal, et une critique acerbe du « capitalisme de surveillance » sur lequel les GAFAM ont construit leur emprise sur le monde. Ou encore celles des employés du « bas de l'échelle », dont le travail est nécessaire à la vie confortable des salariés de la tech, mais qui sont contraints de vivre hors de la vallée du silicium, faute d'un salaire suffisant pour y résider.

Entre le documentaire historique, le carnet de voyage et l'enquête sociale, Silicon Fucking Valley survole ainsi de nombreux sujets passionnants, toujours avec beaucoup d'humour, souvent avec malice, mais évidemment sans vraiment en approfondir aucun. Les convaincus du business de la tech trouveront certainement la série trop grinçante, tandis que les plus sceptiques de l'industrie numérique la jugeront sûrement trop molle dans ses critiques. Quoi qu'il en soit, la mini-série se déguste avec plaisir tout du long, et vu qu'elle est en accès libre sur le site et l'application d'Arte, il n'y aucune raison de s'en priver.