Blocage des sites X : la vérification de l'âge obligatoire dès le 11 janvier

Blocage des sites X : la vérification de l'âge obligatoire dès le 11 janvier

S'ils avaient espéré y échapper, c'est raté ! À partir du 11 janvier, les sites X devront réellement vérifier l'âge de leurs utilisateurs, afin d'interdire leur accès aux mineurs, sous peine d'être bloqués en France.

C'est un coup dur pour les sites pornographiques ! Suite à la loi visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique (SREN) votée en 2024, qui découle elle-même de la loi Avia de 2020, ces services vont être contraints de contrôler l'âge de leurs utilisateurs en leur proposant plusieurs solutions éditées par des prestataires externes, de l'envoi d'un selfie vidéo pour qu'une IA estime l'âge du visiteur à celui d'une pièce d'identité, et ce, à partir du 11 janvier prochain. Un énième rebondissement dans une bataille de longue haleine pour que les mineurs ne puissent aller sur ce type de plateformes.

En effet, la plupart des sites pornographiques en France indiquent bien sur leur page d'accueil qu'ils sont pornographiques et que l'accès est interdit aux mineurs : "Ce site Internet réservé à un public majeur et averti est conforme à toutes les réglementations françaises en vigueur. Il contient des textes, photos et vidéos classés X qui peuvent heurter la sensibilité de certaines personnes". Mais cela s'arrête là. Il est donc très facile pour un enfant, quel que soit son âge, de cliquer sur le bouton "Entrer" en certifiant sur l'honneur "avoir pris connaissance du caractère pornographique de ce site et être majeur selon les lois en vigueur dans [s]on état ou [s]on pays". 

Bref, il s'agit d'un avertissement de pure forme qui n'empêche en aucun cas de voir des contenus pornographiques et, qui plus est, contrevient à la législation française (voir notre article). C'est très problématique étant donné que, selon l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), 2,3 millions de mineurs fréquenteraient chaque mois des sites X. D'où la nécessité pour le Gouvernement de durcir la législation.

Blocage des sites X : un système de vérification d'âge obligatoire

Pour aider les sites X à respecter cette nouvelle législation, l'Arcom a publié en octobre 2024 un référentiel technique détaillant "les exigences techniques minimales, applicables aux systèmes de vérification de l'âge mis en place par les services en ligne, qui mettent à disposition du public des contenus pornographiques". Cela inclut notamment un système de reconnaissance faciale intégré dans un dispositif d'estimation de l'âge par analyse des traits du visage – à condition qu'il puisse vérifier qu'il s'agit bien d'un être vivant et non d'une photographie ou d'une vidéo enregistrée – et une solution de double anonymat.

Concrètement, l'internaute devra télécharger une application – créée par une entreprise privée – et y télécharger un document prouvant sa majorité (pièce d'identité, permis de conduire, contrat bancaire, etc.). C'est cette même application qui confirmera au site pour adultes que l'internaute est majeur, sans pour autant révéler son identité, ce qui autorisera la connexion. De cette façon, le site ne reçoit aucune autre information à son sujet. Il faudra, là aussi, utiliser la reconnaissance faciale, afin que le tiers de confiance puisse s'assurer que l'internaute qui utilise l'application est bien le même que celui qui figure sur les documents d'identité – un adolescent peut très bien emprunter la pièce d'identité d'un autre membre de la famille.

Pour permettre aux sites pornographiques de s'organiser, l'Arcom les autorise à utiliser jusqu'en avril 2025 un formulaire de carte bancaire avec "une transaction à zéro euro" pour filtrer les internautes mineurs (voir notre article). Cette solution n'est que temporaire car elle ouvre la voie aux arnaques en ligne – notamment avec la création de sites miroirs – et elle est assez facile à contourner, puisqu'il suffit pour un mineur d'emprunter la carte de ses parents. Après cette date, les sites X s'exposent à des sanctions s'ils ne respectent pas les exigences. L'amende pourra s'élever jusqu'à 6 % de leur chiffre d'affaires, et l'Arcom pourra ordonner leur blocage sur le territoire français. 

Sites pornographiques : quels sites sont concernés par le blocage ?

Il y a toutefois un petit hic : cette loi ne s'applique pas à tous les sites pornographiques. En effet, contrairement à la première version du projet de loi, le texte adopté ne concerne désormais plus que les plateformes établies en France – comme Jacquie et Michel – ou hors de l'Union européenne. De ce fait, les géants du porno comme Pornhub, Xvideos, Xhamster – les trois sites pour adultes les plus consultés dans l'Hexagone – ou encore YouPorn sont donc en théorie épargnés. Ce changement est dû à la Commission européenne, qui a plusieurs fois rappelé au Gouvernement que, en vertu de la directive sur le commerce électronique de 2000, les fournisseurs de ces services en ligne sont soumis dans l'UE au droit de l'État membre dans lequel ils sont établis, et non à d'autres règles nationales.

Toutefois, la Cour d'appel de Paris a demandé, en octobre dernier, aux FAI d'empêcher techniquement l'accès à plusieurs sites pornographiques qui ne vérifient pas l'âge des internautes, à savoir Pornhub, MrSexe, Iciporno, Xnxx, Xvideos, YouPorn, Redtube, Tukif et Xhamster. La juridiction avait finalement ordonné le blocage de Tukif, Xhamster, Mrsexe et Iciporno sous 15 jours, "jusqu'à ce que soit démontrée la mise en œuvre par ces derniers d'un contrôle autre que purement déclaratif" de la majorité de ses utilisateurs. En revanche, les autres sites, qui ont soulevé une question relative au droit européen, avaient été exemptés, la justice française attendant une décision de la Cour de justice de l'UE. La bataille est donc loin d'être terminée…

Sites pornographiques : un blocage facile à contourner

Et ce n'est pas là la seule difficulté à laquelle sont confrontées les autorités. En effet, n'oublions pas que rien n'est jamais réellement caché sur le web. Même si les sites sont déréférencés et n'apparaissent plus dans les moteurs de recherche (Google, Bing, Qwant et autres), il suffit d'un peu de recherches pour arriver à les retrouver. Or, les ados ne manquent ni d'imagination, ni de réflexes pour parvenir à obtenir ce qu'ils veulent.

Installer un VPN, un serveur qui permet à l'internaute de se délocaliser virtuellement de France, c'est-à-dire de faire croire au FAI qu'il se trouve dans un pays étranger n'ayant aucune réglementation contre les sites classés X, est une de ces méthodes. Une autre méthode consiste à modifier les DNS de l'ordinateur. Il faut juste connaître un minimum les réglages des paramètres de l'ordinateur et, en trois minutes chrono, l'opération est réussie. Avec la vérification d'âge, l'accès aux sites pornos sera donc un peu plus compliqué, certes, mais pas impossible pour autant.

En plus, Internet est comme l'hydre de Lerne : on lui coupe une tête, il en repousse deux. Si les mineurs ne parviennent plus accéder à leurs sites pour adultes préférés, nul doute qu'ils en trouveront d'autres sur la Toile. Et c'est sans compter des plateformes comme X (ex Twitter) qui autorisent les vidéos pour adultes, y compris pédophiles et zoophiles… Bref, il reste encore un long chemin à faire !