Les smartphones seront bien interdits dans tous les collèges à la rentrée 2025

Les smartphones seront bien interdits dans tous les collèges à la rentrée 2025

Élisabeth Borne a officialisé l'interdiction des smartphones dans tous les collèges dès la rentrée scolaire 2025, afin de mettre en place une "pause numérique". Voici quelle forme cette mesure va prendre.

Alors que les vacances d'avril approchent à grands pas, le sénateur LR, François Bonhomme, a interpellé la ministre de l'Education nationale sur "l'usage nocif" des téléphones portables lors des questions d'actualité au gouvernement du Sénat, en particulier sur la généralisation à la rentrée prochaine de "la pause numérique" expérimentée dans une centaine de collèges depuis le début de la rentrée scolaire. Celle-ci implique que les élèves laissent leur téléphone dans des casiers ou des boîtes le matin en arrivant, pour ne les reprendre qu'après les cours. Elizabeth Bornes lui a indiqué que "tous les retours (…) sont très positifs, notamment sur l'amélioration du climat scolaire". Elle en a profité pour confirmer la généralisation de la mesure dès la rentrée scolaire de 2025.

Interdiction des smartphones à l'école : un projet de longue date

Aujourd'hui, les jeunes possèdent un smartphone de plus en plus tôt. D'après une étude du cabinet Junior City publiée en 2021, plus de la moitié des écoliers âgés de 7 à 14 ans (55 %) possèdent un téléphone portable… Au point de susciter l'inquiétude des parents, des professeurs et de nombreux organismes, qui plaident pour un encadrement de leur utilisation, en particulier pour les smartphones. Addiction, contenu violent ou inapproprié, prédateurs sexuels… Les dangers sont nombreux, plaçant l'utilisation de ces appareils au centre du débat public. Aussi, le Gouvernement s'est penché en 2024 sur la possibilité d'interdire tout bonnement et simplement les smartphones dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges. 

Emmanuel Macron lui-même avait plusieurs fois évoqué la possibilité d'imposer des restrictions, voire des interdictions d'accès aux écrans pour les plus jeunes. Le problème avait été remis sur le devant de la scène dans les établissements scolaires à la rentrée 2024 quand, en plus de la distraction que l'appareil entraîne et de son impact sur la concentration et l'apprentissage des élèves, plusieurs affaires tragiques avaient démontré leur rôle, parfois fatal, dans les cas de cyberharcèlement.

Aussi, le 27 août 2024, à l'occasion de sa conférence de presse pour la rentrée des classes, la ministre démissionnaire de l'Éducation nationale, Nicole Belloubet, avait annoncé l'expérimentation de l'interdiction des téléphones portables dans près de 200 collèges dès la rentrée, afin de mettre en place une "pause numérique".

Les établissements impliqués "nous font des bons retours", affirmait déjà le ministre délégué en charge de la réussite scolaire de l'époque, Alexandre Portier, au micro de Cnews/Europe 1. Sans téléphone, les jeunes seraient "investis dans ce temps d'apprentissage". Le précédent gouvernement avait prévu de généraliser cette mesure dès janvier 2025 – à condition que les retours des tests soient positifs. Toutefois, Alexandre Portier tablait plutôt "au plus tard à la rentrée [de septembre] 2025". Le Gouvernement voulait laisser une certaine marge de manœuvre aux chefs d'établissement pour mettre en place la mesure. "Il y a un immense chantier pour arriver à la mettre en œuvre", avait-il expliqué. "Je pense qu'il y a une urgence nationale. On parle de la santé de nos jeunes, c'est une mission sur laquelle on n'a pas le droit de faillir".

Interdiction des smartphones à l'école : quelle forme va prendre le dispositif ?

En France, les smartphones sont en théorie interdits dans l'enceinte des lycées et des collèges. La loi permet au conseil d'administration des lycées d'introduire, dans le règlement intérieur, l'interdiction de l'utilisation par les lycéens de ces appareils. Les élèves peuvent les garder sur eux, mais n'ont pas le droit de s'en servir dans l'établissement scolaire pendant et en dehors des cours, y compris pendant les récréations. Cette interdiction est valable pendant le temps scolaire, mais aussi périscolaire. Il appartient à chaque établissement de déterminer des modalités pratiques pour assurer le respect de la loi.

Cette nouvelle mesure va un cran plus loin. Concrètement, les élèves devront déposer leur smartphone dans un casier ou une pochette en arrivant à l'école. La pause numérique sera effective durant toutes les activités scolaires organisées dans l'établissement ainsi que pendant les activités en dehors de l'école. Des dispositifs pourront être mis en place pour les voyages scolaires, comme la mise en place d'un service vocal pour laisser des messages aux parents ou un blog. Il y aura également quelques exceptions pour les élèves en situation de handicap ou atteints d'un trouble de la santé nécessitant qu'ils aient un portable sur eux. De même, les appareils pourront être utilisés pendant les cours à des fins pédagogiques.

Ce sont les conseils départementaux qui devront gérer les questions pratiques. Ils devront notamment financer la mise en place de la mesure, sans que cela ne soit une obligation. Élisabeth Borne estime que le coût d'une telle opération pourrait "être nul ou de quelques milliers d'euros". Reste que cette annonce soulève quelques questions pratiques. Comment les établissements vont-ils gérer logistiquement le dépôt et la récupération de centaines de téléphones chaque jour ? Quelles seront les sanctions pour les élèves qui ne respecteraient pas la règle ? Les parents seront-ils d'accord de ne pas pouvoir contacter leurs chérubins lorsqu'ils le souhaitent ?

Interdiction des smartphones à l'école : une expérimentation bientôt généralisée

L'annonce de cette mesure s'était faite suite à un rapport d'experts sur l'impact des écrans sur la jeunesse, commandé par le président Emmanuel Macron et remis le 30 avril 2024. Nicole Belloubet avait à l'époque tenu à préciser qu'il ne s'agissait pas de "réfuter l'utilisation pédagogique du numérique". Au contraire, l'ancienne ministre avait évoqué l'importance de l'intelligence artificielle dans l'éducation, appelant à la création d'une feuille de route spécifique pour son utilisation dans les écoles et collèges. "Il faut permettre aux professeurs d'utiliser l'intelligence artificielle", avait-elle déclaré.

Mais ce dispositif s'inscrit dans un mouvement plus large de contrôle et de limitation du numérique chez les plus jeunes porté par le gouvernement démissionnaire et le Président de la République bien avant la dissolution. Emmanuel Macron avait notamment appelé, lors d'une conférence de presse tenue le 25 avril dernier, à reprendre le contrôle sur les contenus en ligne, estimant qu'"avant 15 ans, il doit y avoir un contrôle parental sur l'accès à cet espace numérique", et plaidé pour la mise en place d'"une majorité numérique à 15 ans en Europe". 

Une idée qui semble partagée par la majorité des Français puisque, d'après les résultats d'un baromètre sur les usages des écrans par les enfants et les adolescents parus en juillet 2024, 73 % d'entre eux se disent favorables à l'interdiction des réseaux sociaux chez les moins de 15 ans, et  75 % des sondés souhaitent que les usages soient fortement restreints dans les lycées (voir notre article). C'est pour cette raison que le Gouvernement a décidé de poursuivre dans cette voie.