Siri n'est pas fini : Apple poursuivi en justice pour publicité mensongère

Sale temps pour Apple. La firme à la pomme cumule les problèmes en ce moment, avec du retard dans la nouvelle version de Siri, son assistant vocal intelligent, et une plainte pour publicité mensongère.
Le temps se gâte pour Apple. Car si la firme de Cupertino s'est bâti une réputation d'innovation et de fiabilité durant des décennies, elle se trouve aujourd'hui dans une tourmente inattendue en accumulant les retards et les déceptions. Une situation délicate qui vient de s'aggraver par un dépôt de plainte et qui l'oblige à revoir ses plans et même à se réorganiser pour tenter de tenir ses objectifs et ses promesses sur un marché de plus en plus concurrentiel qui met à mal son image.
En cause, le lancement retardé de Siri, son assistant vocal amélioré par une intelligence artificielle (IA) générative, initialement présenté comme une nouvelle révolution technologique. Ce revers représente un défi majeur pour l'entreprise, dont les promesses d'Apple Intelligence semblent bien loin de se réaliser.
Nouveau Siri : les promesses non tenues d'Apple Intelligence
Lors de la Worldwide Developers Conference (WWDC) en juin 2024, Apple avait dévoilé en grandes pompes ses ambitions pour Siri. Avec des fonctions propulsées par une IA générative, l'assistant devait offrir une interaction bien plus personnalisée avec les utilisateurs. Dans les vidéos promotionnelles, Siri était capable de gérer des tâches complexes, comme organiser un déjeuner à partir de diverses informations issues de l'iPhone ou remplir des formulaires automatiquement grâce aux données personnelles enregistrées." Avec des capacités de compréhension du langage encore plus riches, Siri est plus naturel, plus adapté au contexte et plus personnel, et il est en mesure de simplifier et accélérer les tâches quotidiennes. Il peut compenser si les utilisateurs butent sur certains mots et conserver le contexte d'une demande à l'autre ", affirmait ainsi Apple l'an dernier dans ses présentations.
Las, ces belles promesses ont été rapidement mises à mal. En interne, les tests ont révélé des dysfonctionnements majeurs, ce qui a contraint Apple à repousser à plusieurs reprises la sortie de cette version améliorée de Siri, désormais prévue pour 2026.
Les consommateurs, séduits par les publicités et impatients de découvrir ce Siri nouvelle génération, ont été les premiers déçus. Apple avait mis en avant ces fonctions lors de la sortie de son iPhone 16, soutenu par une campagne publicitaire majeure avec l'actrice Bella Ramsey. Pourtant, ces capacités promises n'ont jamais vu le jour. Les spots publicitaires, diffusés massivement, laissaient entendre que Siri, via Apple Intelligence, serait disponible dès l'automne 2024. C'est précisément cette stratégie de communication, jugée trompeuse, qui a déclenché une plainte pour "publicité mensongère" devant un tribunal fédéral de Californie. Les plaignants estiment avoir été induits en erreur par une promesse non tenue et réclament des compensations.
Ce type de litige est rare pour Apple, d'autant que la marque a généralement su respecter les délais fixés pour le lancement de ses produits. Néanmoins, la complexité du développement de Siri semble avoir pris de court la firme californienne. Comme l'ont rapporté plusieurs articles récents, certains grands pontes de l'entreprise ont reconnu en interne le retard pris dans le développement du nouveau Siri et d'Apple Intelligence. Selon Mark Gurman. le, toujours très bien informé journaliste de Bloomberg, Robby Walker, directeur de la division Siri, aurait reconnu des retards "moches et embarrassants", ajoutant que les fonctions manquantes de Siri ne seraient peut-être pas intégrées à iOS 19 cette année comme prévu initialement.
Apple Intelligence : en retard sur la concurrence
Face à cette situation de crise, John Giannandrea, le responsable de l'intelligence artificielle recruté en 2018 pour superviser ce projet, a récemment été écarté. Tim Cook, directeur général d'Apple, a perdu confiance en sa capacité à mener à bien le développement de l'IA, confiant désormais la tâche à Mike Rockwell, autre figure clé de la société, jusqu'ici responsable du casque Vision Pro.
Le retard d'Apple Intelligence n'est pas seulement un problème interne pour la marque à la pomme. Sur le marché ultra-compétitif de l'IA, Apple risque de se retrouver en position de faiblesse face à ses concurrents, notamment Google et Samsung. Pendant qu'Apple tarde à livrer une version performante de Siri, Samsung, équipé de l'IA Gemini de Google, gagne du terrain avec des technologies similaires. Alors que Siri avait été le premier assistant vocal de l'histoire en 2011, Apple se trouve aujourd'hui distancé dans une course où elle avait longtemps été pionnière.
Cette plainte pour publicité mensongère pourrait bien marquer un tournant pour la stratégie d'Apple. Déjà contraint de supprimer ses vidéos publicitaires sur YouTube, le géant américain va devoir gérer les attentes de ses utilisateurs tout en s'efforçant de rattraper son retard en matière d'intelligence artificielle. Face à des concurrents qui avancent rapidement, Apple se retrouve dans une position délicate, un terrain sur lequel la société n'a pas l'habitude de jouer.
De l'Apple Car à l'Apple Vision Pro : entre abandon et déception
D'autant que Siri et Apple Intelligence ne sont pas les seuls problèmes de Cupertino, qui fait face à des choix stratégiques délicats depuis quelques temps. En février 2024, on apprenait que la firme abandonnait son projet de voiture autonome, l'Apple Car : une aventure entamée en 2014 qui aurait englouti quelque 10 milliards de dollars en recherches vaines. Par ailleurs, l'Apple Vision Pro, le fameux casque de réalité virtuelle et augmentée lancé fin 2023 n'a pas rencontré le succès attendu. Malgré les promesses mirobolantes de Tim Cook qui espérait en faire une nouvelle révolution technologique, similaire à l'ordinateur et au smartphone, le gadget n'a visiblement pas séduit le public, non seulement à cause de son prix élevé – 4000 euros en France –, mais aussi et surtout, à cause de son inutilité – sans parler du fait qu'il enferme ses utilisateurs dans une bulle.
Enfin, même si l'iPhone se vend toujours très bien, ses dernières versions (15 et 16) semblent marquer le pas en terme d'innovation, se contentant de petites améliorations incrémentales, prouvant qu'Apple a atteint un palier. Avec une progression désormais logarithmique sur le plan technologique, le concept du smartphone semble s'essouffler, tous les modèles commençant à se ressembler sur un marché particulièrement encombré sur lequel les concurrents, notamment les Chinois, se montrent plus dynamiques. Et si les dernières rumeurs font état d'un iPhone pilant et d'un modèle ultra fin, il faudra qu'Apple fasse preuve d'une grande imagination pour séduire à nouveau un public un brin blasé.
Il n'y a guère que dans le domaine de l'informatique pure qu'Apple fait encore figure de pionnier. Avec ses puces M, et notamment le M4 qui équipe à présent les Mac et certains iPad, la firme de Cupertino a pris une sérieuse avance sur les autres acteurs, prouvant que son architecture combinant de très hautes performances à une excellente efficacité énergétique est nettement supérieure aux solutions d'Intel et d'AMD. Mais ces spécialistes des processeurs pour PC n'ont pas dit leur dernier mot, et l'arrivée de Qualcomm et de Nvidia sur ce marché pourrait bien rebattre les cartes dans un avenir proche. Bref, Apple joue gros en ce moment sur tous les tableaux, et 2025 pourrait bien être une année charnière dans l'histoire de la Pomme. Et même si Apple n'a pas de problèmes financiers – la société est toujours valorisée à quelque 3000 milliards de dollars et elle dispose d'un confortable trésor de guerre – , Tim Cool ne doit pas très bien dormir en ce moment…