Netflix Essentiel : la formule avec pub devient encore plus intéressante

Contre toute attente, Netflix décide d'améliorer sa formule Essentiel avec pub, à 5,99 euros par mois. Les contenus seront proposés en 1080p sur deux flux en simultané, ce qui rend l'abonnement plus intéressant que la version sans publicité...
Lors de son lancement, l'offre à 5,99 euros par mois Netflix Essentiel avec pub – qui, comme son nom l'indique, comporte de la publicité – avait reçu un accueil pour le moins mitigé de la part des utilisateurs. Mais si sa mise en place est assez lente – les analystes tablent sur 10 à 20 millions d'abonnements avec publicité souscrits par an, au lieu de l'ambition initiale de 40 millions, comme le rapporte BFM Bourse –, le service de vidéos à la demande (SVOD) se dit particulièrement satisfait des résultats de sa nouvelle formule, affirmant qu'elle est plus rentable que ses autres abonnements. En effet, dans une lettre à ses investisseurs pour le 1er trimestre 2023, l'entreprise se félicite des "performances et de la trajectoire saine" des chiffres de l'abonnement low cost au 1er trimestre 2023, en particulier aux États-Unis. L'occasion pour elle d'y apporter quelques petites améliorations.
Netflix Essentiel avec pub : deux points noirs corrigés
En effet, le géant du streaming annonce qu'il améliore deux points importants de son offre Essentiel avec pub qui ont tendance à refroidir les abonnés potentiels. En effet, jusqu'ici, ce forfait ne permettait le visionnage que sur un seul appareil, et seulement en HD – soit dans une définition de 720p. Logique : la Full HD est réservée à la formule Standard et la 4K-UHD au forfait Premium. L'entreprise a décidé que la définition maximale sera désormais de 1080p et qu'il sera possible de regarder du contenu sur deux écrans en simultané. "Nous pensons que ces améliorations rendront notre offre encore plus attrayante pour un plus grand nombre de consommateurs et qu'elles renforceront l'engagement des abonnés actuels et des nouveaux abonnés à la formule avec publicités", explique la plateforme. Notons toutefois que, avec ces ajouts, les autres abonnements sans publicité risquent d'être remaniés, puisqu'ils deviennent alors beaucoup moins intéressants au niveau du rapport qualité/prix – on peut même s'attendre à ce que l'abonnement Essentiel sans publicité à 9 euros par mois, lui aussi limité à 720p et un seul écran, finisse par disparaitre.
Pour le moment, le lancement de cette nouvelle version de l'abonnement Essentiel avec pub a uniquement lieu au Canada et en Espagne. Netflix ayant toutefois exprimé son envie d'étendre cette amélioration aux 12 pays – dont la France – où la formule est disponible, The Verge estime que nous devrions pouvoir en profiter au cours du mois.
Netflix Essentiel avec pub : avantages et contraintes du forfait à 5,99 euros
Pour rappel, la nouvelle formule de Netflix s'ajoute aux trois forfaits existants, qui restent évidemment au catalogue. Netflix Essentiel avec pub constitue ainsi l'offre d'entrée de gamme de la plateforme, à 5,99 euros par mois – soit à 3 euros de moins que l'offre Essentiel classique –, toujours sans engagement, mais sans la période d'essai gratuit – cette période de test gracieux étant supprimée depuis un moment, quelle que soit la formule. Les modalités de souscription sont inchangées – tous les détails sont déjà sur le site Netflix. Reste que le géant du streaming a grillé la politesse à Disney+, qui doit lancer prochainement une formule similaire.
On s'en doute, ce forfait low cost présente plusieurs différences par rapport aux autres formules. D'abord, avec Netflix Essentiel avec pub, des annonces publicitaires de 15 à 30 secondes sont systématiquement diffusées avant et pendant les programmes – pas après, bien sûr ! – avec une moyenne de 4 minutes par heure, ce qui reste raisonnable – et assez proche du taux de publicité sur les chaînes télé classiques. Pour rappelle, comme le souligne l'Arcom – l'autorité qui résulte de la fusion entre le CSA et l'Hadopi –, la règlementation pour la télévision en France impose une limite de 9 minutes de publicités par heure en moyenne – et de 12 minutes aux heures de grande écoute, entre 21 h 00 à 22 h 00, par exemple. Bien entendu, il n'est pas possible de jouer de l'avance rapide pour échapper aux pubs !
Netflix Essentiel avec pub est compatible avec plusieurs plateformes – TV connecté, box Internet, boîtier Apple TV, ordinateur, smartphone ou tablette –, comme les autres formules Netflix. Toutefois, il n'est pas possible de télécharger des contenus pour les regarder hors ligne, contrairement au forfait Essentiel. Par ailleurs, contrairement aux autres offres, le catalogue est limité. Tous les programmes de la plateforme ne sont pas accessibles avec cette offre à bas prix. "Certains films et séries sont exclus de ce forfait en raison de restrictions de licence", indique Netflix sur sa FAQ (page de questions-réponses), sans davantage de précisions sur les contenus concernés – certaines sources parlent de 15 % du catalogue. Les titres non accessibles sont marqués par une icône de cadenas. Netflix Games, lancée fin 2021, n'est ni le point fort de la plateforme, ni un argument pour s'abonner, même si le catalogue s'est enrichi au fil des mois et que la plateforme investit pour développer sa position dans ce secteur…
En revanche, il est toujours possible d'accéder aux jeux Netflix, sans aucune limitation cette fois. Il faut dire que la sectionNetflix Essentiel avec pub : un pari pour le moins risqué
Détail important : les profils jeunesse ne sont pas concernés par la publicité. Une bonne nouvelle donc. D'autant que la plateforme indique par ailleurs cibler les annonces. "À l'heure actuelle, les publicités peuvent être personnalisées en fonction de vos interactions avec Netflix (par exemple, le type de contenu que vous regardez) et des informations que vous fournissez à Netflix", souligne la plateforme dans sa FAQ – qu'il est vivement conseillé de lire avant de souscrire. C'était l'une des craintes que l'on avait avec l'introduction de la publicité, et qui a été confirmée en filigrane.
Car si l'évolution vers une formule fiancée par la publicité paraissait à la fois souhaitable et inéluctable, elle pose une nouvelle fois la question du profilage. En effet, en sachant exactement qui regarde quoi, grâce à ses profils utilisateurs, Netflix connaît parfait les goûts de ses abonnés, ce qui lui permet de cibler très précisément les publicités diffusées avec ses contenus. Un atout indéniable pour proposer ses services aux annonceurs. Mais qui n'est pas du goût de tous, surtout à une époque où le pistage et la confidentialité des données personnelles constituent des sujets très sensibles. Certes, Netflix parle uniquement de "publicités personnalisées" pour le moment, rien ne dit que la plateforme et ses clients-partenaires sauront résister ensuite à la tentation d'aller plus loin… Selon les prévisions, l'intégration de publicités pourrait rapporter quelque 8,5 milliards de dollars par an à Netflix à partir de 2027. Un jolie manne, qui permettrait à la plateforme de retrouver des couleurs face à la concurrence. Les publicités seraient gérées en outre par Microsoft, avec qui Netflix a signé un partenariat en 2022.
Avec ce forfait à bas prix – tout est relatif… –, Netflix compte bien redorer son blason et inverser la tendance en attirant de nouveaux abonnés. Reste à voir si cette formule parvient à séduire de nouveaux clients car, d'une part, l'offre ne cesse de s'élargir avec une concurrence de plus en plus féroce – Disney+ et Amazon Prime Video, bien sûr, mais aussi les nouveaux services de replay payants de TF1 et de M6 –, et, de l'autre, une nouvelle forme de streaming gratuit entièrement financé par la publicité se développe, avec le FAST TV. Certes, le principe est différent puisqu'il s'agit cette fois de diffusion linéaire, comme avec la télévision classique – voir ce que propose Pluto TV, notamment –, mais avec l'arrivée la publicité, Netflix se rapproche de la télé à l'ancienne, ce qui pourrait ne pas plaire aux jeunes générations, avides de contenus à la demande…
Netflix : une concurrence plus en plus rude
Les temps sont durs pour Netflix. Après avoir régné en maître sur le streaming vidéo depuis sa création, et malgré son succès durant les confinements, la célèbre plateforme a perdu des abonnés en 2022, ce qui a entraîné une chute sensible de ses revenus. Une situation délicate, accentuée par la montée en puissance de concurrents sérieux comme Disney+, qui a obligé l'entreprise à revoir son modèle économique, visiblement plus tout à fait adapté au marché actuel. Pour mieux répondre à la demande des consommateurs et renouer avec son insolente croissance, Netflix s'était donc lancé dans une petite révolution, avec trois changements majeurs : d'abord, l'arrivée d'une offre moins chère financée en partie par la publicité ; ensuite, la diffusion d'émissions en direct, sur le modèle de la télévision traditionnelle et de plateformes comme Twitch ; enfin, le partage de comptes, une pratique courante, tolérée tacitement jusque-là, qui devrait devenir payant dans les mois à venir (voir notre article). De quoi changer profondément la donne en bouleversant bien des habitudes.
En 2022, pour la première de son histoire, la plateforme de vidéo en streaming avait perdu des abonnés. Comme l'expliquaient L'Express et Les Échos, le service de SVOD (vidéo sur abonnement) comptait ainsi 200 000 clients de moins au premier trimestre 2022 qu'au dernier trimestre 2021 – et même 600 000 sur ses terres natales, aux États-Unis et au Canada ! – alors qu'il espérait en recruter 2,5 millions de plus. Une contre-performance historique – surtout après la hausse record pendant le confinement – qui a entraîné une chute spectaculaire de 23% de son action en Bourse dans les heures qui ont suivi la présentation de ses résultats trimestriels, le 19 avril 2022. Et la situation avaient encore empiré ensuite, puisque la plateforme avait perdu 1 million d'abonnés au cours du deuxième trimestre 2022, comme elle l'avait annoncé dans le communiqué à ses actionnaires le 19 juillet.
La perte d'abonnés de Netflix s'explique par trois causes principales. D'abord, l'entreprise aurait perdu quelque 700 000 clients en Russie en l'espace de quelques semaines, suite à la suspension de son service en guise de sanction pour la guerre en Ukraine. Sans cette mesure, elle tablait sur 500 000 abonnements supplémentaires par rapport au trimestre précédent soulignait-elle dans son communiqué de résultats. Ensuite et surtout, alors qu'elle a longtemps été quasiment seule sur ce secteur naissant, la plateforme de vidéo doit faire face depuis quelques années à une concurrence de plus en plus rude, avec la multiplication des services de streaming et, surtout, l'arrivée de mastodontes comme Disney+ ou Amazon Prime Video, qui ont gagné de solides parts de marché en peu de temps – et ce n'est pas prêt de s'arranger avec les arrivées de Paramount+, Max (HBO) et Universal+. Enfin, pour continuer à produire des contenus originaux – sa grande spécialité qui a participé à sa popularité –, Netflix n'a cessé d'augmenter ses tarifs partout dans le monde : ainsi l'abonnement de base, avec un seul flux en HD (définition 720p) est désormais à 8,99 euros par mois en France – contre 7,99 euros à son arrivée en 2014 –, la formule standard est à 13,49 euros par mois avec deux flux en HD (1280 x 720 pixels), tandis que la formule haut de gamme, avec quatre flux HD ou 4K, atteint aujourd'hui 17,99 euros contre 15,99 euros en octobre 2021.
Conséquence : de nombreux clients – acquis ou potentiels – sont allés voir ailleurs et beaucoup s'adonnent désormais au partage de compte pour diminuer les frais, sous entre proches, soit avec des inconnus, via des plateformes spécialisées (voir notre article). Une pratique contre laquelle Netflix va tenter de lutter, en proposant une offre adaptée via l'ajout de profils supplémentaires moyennant finance, ce qui risque fort d'avoir un effet négatif à terme sur sa base d'abonnés, surtout si la concurrence l'autorise ou la tolère sans supplément de prix…

Netflix : des émissions en direct comme sur Twitch ?
L'autre changement majeur que Netflix préparerait serait la diffusion de contenus en direct, en live streaming. C'est du moins ce que la plateforme aurait confirmé il y a quelques mois à Deadline, un média qui suit l'actualité des studios américains. Selon cette confidence, Netflix proposerait des émissions non scénarisées et des spectacles de type stand-up. De nouveaux contenus exclusifs qui ressembleraient à ceux que l'on trouve sur des plateformes à la mode comme Twitch – qui appartient à Amazon – mais aussi comme on en trouve sur les chaînes de télévision traditionnelles. Mais il n'est pas impossible que Netflix enrichisse également son catalogue live de programmes sportifs, comme Amazon en propose avec Prime Video, notamment les matchs de foot de la Ligue 1, voire, qui sait, d'événements culturels (spectacles, concerts…), le but étant, là encore, d'arrêter l'hémorragie d'abonnés tout en attirant un nouveau public. Toutefois, contrairement à l'offre à bas prix avec publicité, l'échéance du direct est encore floue et pour le moins lointaine. Et si elle se confirme, il y a peu de chances de la voir apparaître avant 2023, le temps de mettre en place toute l'infrastructure nécessaire et de concevoir les programmes.
Netflix : faire payer le partage de comptes
L'autre grand levier sur lequel Netflix veut jouer à court terme pour redresser ses finances, c'est le partage de comptes. Jusqu'à présent, la plateforme tolérait qu'un compte soit partagé par plusieurs personnes d'un même foyer. Une condition indispensable pour plusieurs membres d'une famille regardent des contenus différents simultanément, sur téléviseur, ordinateur, tablette ou téléphone, éventuellement dans les lieux différents, ce qui permettait notamment à des enfants délocalisés – pour du travail ou des études – de profiter de l'abonnement de leurs parents. Mais, on le sait, le partage de comptes s'est largement étendu bien au-delà des foyers officiels, et nombreux sont les amis qui mutualisent un abonnement pour réduire leurs frais.
Si Netflix a laissé faire pendant ses belles années, il en sera bientôt tout autrement. La plateforme dispose en effet de moyens assez simples pour identifier et localiser les connexions simultanées à un même compte – via l'adresse IP notamment. Et elle envisage de proposer une formule spéciale, avec des profils supplémentaires, commercialisée à un tarif encore supérieur – environ 3 euros par profil ajouté. Elle a d'ailleurs déjà lancé divers tests dans ce sens dans plusieurs pays d'Amérique latine (Honduras, Argentine, Salvador, Guatemala…). Une chose est sûre : après des années de tolérance, Netflix compte faire payer le partage de compte, et ce dès juin 2023 !