Réseaux sociaux interdits aux moins de 15 ans : pas si simple…

L'Assemblée nationale vient d'adopter une proposition de loi visant à fixer à 15 ans l'âge minimum pour s'inscrire seul sur un réseau social, sans l'autorisation des parents. Une intention louable, mais un dispositif difficile à mettre en place...
Depuis plusieurs années, la législation européenne, via l'article 8 du règlement général sur la protection des données (RGPD), impose aux réseaux sociaux comme Instagram, Facebook, TikTok et Snapchat de fixer une "majorité numérique" située entre 13 et 16 ans – chaque pays est libre de décider lui-même de ce seuil, tant qu'il se situe dans la fourchette. Cette majorité numérique correspond à l'âge à partir duquel on considère qu'un utilisateur maîtrise son image et ses données personnelles, et qu'il est en mesure de donner son accord pour que ces informations soient utilisées par des services en ligne, sans avoir besoin d'autorisation parentale.
Bien évidemment, ce seuil n'est absolument pas respecté dans les faits. Selon la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), la première inscription sur les réseaux sociaux intervient "en moyenne vers 8 ans et demi, et plus de la moitié des 10-14 ans y sont présents", et ce, même si de nombreuses plateformes comme Facebook, Instagram et TikTok sont tout bonnement interdites aux moins de 13 ans – mais aucune vérification sérieuse n'est mise en place. C'est bien simple, selon l'enquête Génération numérique "les pratiques numériques des jeunes de 11 à 18 ans" publiée par la CNIL en mars 2021, 44 % des 11-18 ans ont déjà menti sur leur âge sur les réseaux sociaux.
Jusqu'ici, la majorité numérique ne faisait pas l'objet d'une définition juridique dans la loi française. L'âge minimum pour accéder aux plateformes en ligne était librement défini par les plateformes elles-mêmes. Face à ce problème, le député d'Horizon Laurent Marcangeli a présenté le jeudi 2 mars un projet de loi visant à fixer la majorité numérique à 15 ans, comme le rapporte Le Monde. Un texte qui a été adopté par l'Assemblée nationale à quasiment l'unanimité, à 82 voix contre 2. Son objectif est d'"instaurer une majorité numérique" et de "lutter contre la haine en ligne". Les parents devront donc donner – ou non – leur accord pour que leur enfant de moins de 15 ans puisse s'inscrire sur les réseaux sociaux. De plus, les plateformes seront contraintes de vérifier l'âge de tout nouvel inscrit. Toutefois, la mise en œuvre du système reste floue – et c'est bien le problème. Le texte de loi doit encore être soumis au Sénat.
Réseaux sociaux : une majorité numérique à 15 ans
Pornographie, cyberharcèlement, contenus inappropriés, désinformation, standards de beauté inatteignables, addiction aux écrans... Les dangers auxquels font face les plus jeunes – et pas que – sur Internet sont nombreux, d'autant qu'à cet âge, les internautes sont plus vulnérables face aux propos et aux contenus mis en ligne par d'autres personnes, mais sont également moins conscients des enjeux et répercussions possibles du contenu qu'ils publient eux-mêmes, comme les informations personnelles et les photos. Par ailleurs, en laissant leur profil ouvert au public – c'est généralement le cas par défaut pour les profils "adultes" –, les mineurs peuvent être exposés à des personnes aux intentions malveillantes, qui peuvent prendre contact avec eux.
Instaurer une majorité numérique et lutter contre la haine en ligne | L'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi, en première lecture.
— Assemblée nationale (@AssembleeNat) March 2, 2023
En savoir plus https://t.co/MICssB4ven#DirectAN pic.twitter.com/COUq14mDTM
Depuis son adoption le 25 mai 2018, le RGPD renforce le consentement et la transparence concernant l'utilisation des données. Avec l'article 8.1, les données personnelles des mineurs sont désormais traitées différemment selon leur âge. Ainsi, l'accord parental est nécessaire pour les mineurs pour recueillir des données sensibles ou photographiques, utiliser des données pour de la prospection commerciale ou les vendre à des tiers. En adoptant cette loi, les plateformes seront obligées de mettre en place un dispositif pour s'assurer que les utilisateurs de moins de 15 ans aient bien obtenu cet accord. En cas de manquement, elles s'exposent à une amende pouvant aller jusqu'à 1 % du chiffre d'affaires mondial de l'entreprise. Un amendement a également ajouté une contrainte en prévoyant que les parents ne pourraient pas donner leur accord pour les moins de 13 ans, sauf pour des plateformes labellisées.
"Il s'agit pour chacun – parents, entreprises, jeunes – de prendre ses responsabilités" face à l'amplification des pratiques numériques des enfants, explique Laurent Marcangeli. Rejetant tout "discours moralisateur", le député a défendu des "garde-fous indispensables" à poser face à "la précocité croissante de la puberté numérique et de la puissance des outils mis à disposition de nos jeunes". L'objectif premier est de "faire reculer le cyberharcèlement entre jeunes", dont les réseaux sociaux et les messageries instantanées constituent l'un des principaux vecteurs – ils donnent de l'ampleur au harcèlement, qui suit la victime absolument partout et tout le temps.
Réseaux sociaux : un dispositif de vérification d'âge difficile à mettre en place
Pour faire appliquer cette limite d'âge, le projet de loi doit permettre d'instaurer l'obligation pour les réseaux sociaux "de mettre en place une solution technique de vérification de l'âge des utilisateurs finaux et du consentement des titulaires de l'autorité parentale" pour les moins de 15 ans. Notons que certains réseaux sociaux s'y essayent déjà, comme Instagram, qui a mis en place un système de selfie vidéo, qui est analysé et validé par une intelligence artificielle (voir notre article). Si le Sénat vote la loi, les modalités du dispositif seront discutées et définies par les autorités compétentes – l'Arcom devra certifier les solutions après la consultation de la CNIL – puis arrêtées par le Conseil d'État. Le système mis en place aura la dure tâche de concilier l'efficacité et la protection de la vie privée et des données personnelles, comme le rappelait la CNIL en juillet 2022. En effet, certains dispositifs de vérification d'âge reposent sur une collecte massive de données personnelles et apparaissent dès lors difficilement conformes aux principes de protection des données – comme la reconnaissance faciale. D'autres, moins intrusifs, sont inefficaces parce que trop aisément contournés par les mineurs, qui ne manquent pas d'imagination lorsqu'il s'agit d’enfreindre les règles.
Actuellement, toutes les solutions proposées peuvent facilement être contournées. En effet, l'usage d'un simple VPN localisant l'internaute dans un pays qui ne demande pas une vérification de l'âge de cet ordre peut permettre à un mineur de contourner un dispositif de vérification de l'âge appliqué en France, ou de contourner le blocage d'un site Web qui ne respecte pas ses obligations légales. De même, il est difficile d'attester que la personne qui utilise une preuve d'âge est bien celle qui l'a obtenue. Les solutions envisagées pourraient bien être les mêmes que celles qui seront mises en place pour faire respecter la limite d'âge d'accès aux sites pornographiques, que le Gouvernement est en train de mettre en place (voir notre article).
La première option serait d'effectuer un contrôle par vérification de la carte bancaire avec une transaction à zéro euro. Une solution qui laisse quelque peu sceptique, étant donné qu'elle ouvre la voie aux arnaques en ligne – notamment avec la création de sites miroirs – et qu'elle est assez facile à contourner, puisqu'il suffit pour un mineur d'emprunter la carte de ses parents ou d'utiliser sa propre carte de retrait. L'autre solution serait de mettre en place un système de double anonymat, soit lorsque l'entreprise certifiant l'âge de l'internaute ignore pour quel type de site l'authentification est nécessaire. Mais là encore, il suffirait d'installer un VPN, un serveur qui permet à l'internaute de se délocaliser virtuellement de France, c'est-à-dire de faire croire au FAI qu'il se trouve dans un pays étranger où la réglementation n'impose pas de vérification...
- Réseaux sociaux 15 ans
- Frédéric cherche à faire le buzz sur les réseaux sociaux. il a ajouté une image de manchots sur une image de plage. retrouvez l'image originale de la plage. que cachent les manchots ? [résolu] > Forum Windows
- Réseaux sociaux > Forum Cloud
- Sandra a décidé de mieux contrôler son image et sa présence sur différents réseaux sociaux. qu’est-il possible de faire sur ces réseaux ? > Forum Études / Formation High-Tech
- Iphone 15 > Guide
- Frédéric cherche à faire le buzz sur les réseaux sociaux. > Forum Loisirs / Divertissements